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Fraude

L’état de l’adoption d’ads.txt en France (interview D. Pironon, Smart)

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Ads.txt a un an. Lancée en mai 2017 par l’Interactive Advertising Bureau (IAB), cette initiative de lutte contre la fraude serait aujourd’hui adoptée par 72 % de 5 000 plus importants publishers proposant leur inventaire sur les ad exchanges aux États-Unis, d’après le classement de l’entreprise Pixalate. En France, la plateforme supply side (SSP) Smart, devenue mondiale, a annoncé l’adoption d’ads.txt en décembre dernier en indiquant que seuls les inventaires des éditeurs conformes à cette norme seraient proposés. Pour faire le point de l’adoption d’ads.txt en France, nous interrogeons David Pironon, directeur du programmatique chez Smart.

Quel bilan tirez-vous au niveau mondial et notamment en France de votre décision de ne travailler qu’avec des inventaires conformes ? Avez-vous dû retirer beaucoup d’inventaires de votre plateforme ?

D.P. : Il faut bien distinguer deux situations : quand ads.txt est absent de l’inventaire et quand il est présent, auquel cas soit Smart peut être mentionnée correctement, soit le fichier est erroné, soit Smart n’apparaît pas du tout. Notre décision annoncée en décembre dernier consistait à bloquer les inventaires ayant adopté ads.txt dans lesquels Smart n’était pas mentionnée ou que la plateforme était mentionnée de manière erronée.

Cela correspondait à quels pourcentages et est-ce que la situation a beaucoup évoluée aujourd’hui ?

D.P. : Aujourd’hui nous envoyons 100 % de domaines ads.txt conformes, sachant que 86 % de nos urls ont adopté ads.txt, contre 50 % lors du lancement de notre initiative. À l’époque, 5 % présentaient des erreurs et  45 % n’avaient pas adopté d’ads txt. L’évolution est donc significative : non seulement il n’y a plus d’erreur comme  la part de 50 % est montée à 86 %. C’est un sujet que nous évoquons au quotidien avec les DSP ne serait-ce que pour nous mesurer vis-à-vis de nos concurrents. Nous sommes selon ces acteurs parmi les meilleurs élèves en matière de taux d’adoption d’ads.txt.

Ces chiffres globaux sont-ils aussi représentatifs du marché français ?

D.P. : Ce sont en effet des chiffres globaux mais les différences sont peu significatives d’un pays à un autre. Ce qui impacte les taux d’adoption sont les types d’inventaires.  Les inventaires représentés par des ad networks ou les inventaires de type long tail sont de moins bons  élèves, car un nombre important d’intermédiaires ajoute de l’inertie dans la chaîne. Nous avons peu d’acteurs de ce type. Des régies intégrées ou des régies externes qui représentent de manière exclusive ou directe les éditeurs ont plus de facilité à le faire. Par ailleurs, nous avons mené plusieurs campagnes, webinars et emailings, diffusant des fiches pratiques pour bien expliquer comment mettre en place ads.txt.

Ads.txt semble extrêmement simple à adopter. Les éditeurs français ont-ils accueillis favorablement et adopté rapidement cette mesure ?

D.P. : Oui, tout à fait. Aujourd’hui un acteur sérieux n’a pas le choix, c’est un sujet suivi de très près par les DSP qui n’hésiteront pas bientôt à conseiller leurs clients à acheter prioritairement de l’inventaire ads.txt. De gros acteurs comme DBM ou Trade Desk ont déjà annoncé qu’ils testaient ce genre de mesure. Nous pensons que c’est une très bonne initiative parce que cela permet de récréer de la valeur sur les inventaires tout en offrant une assurance aux acheteurs. Mécaniquement ads.txt permet de faire disparaître des intermédiaires qui n’ajoutent aucune valeur dans la chaîne.

Fraude.Ads.txt est une solution qui permet de lutter contre la fraude d’usurpation de nom de domaine sur les plateformes programmatiques. Quel est le poids de ce type de fraude dans l’ensemble de pratiques servant à tromper l’écosystème ?

D.P. : Certaines estimations, comme celle d’IAS, font état d’un montant de 16,4 milliards de dollars qui aurait été détourné par ce type de fraude en 2017. Quoi qu’il en soit, je peux vous affirmer que ce type de fraude est un vrai problème, même s’il n’est pas le seul. Ads.txt règle une bonne partie du problème, ce serait utopique de penser que cela l’éradiquera totalement, car les fraudeurs trouvent toujours des moyens de continuer.

Quelles sont les autres pratiques qui posent problème et voyez-vous des solutions possibles à cela ?

D.P. : Les malwares et les fausses impressions publicitaires. Ceci étant, dès l’instant où les outils de vérification et de combat de la fraude sont adoptés, cette dernière baisse à moins de 5 %, ce qui permet de la limiter de manière très significative. Des outils existent aussi pour contrôler les créations publicitaires de manière à bloquer avant les enchères toute création suspectée d’être malveillante. A noter que la complexité est majeure dans les environnements mobiles. Il faut garder à l’esprit que tous ces outils, ads.txt y compris, permettent aux éditeurs d’être  transparents et de monter la valeur de leurs inventaires. C’est ce qui leur permet de s’en sortir face aux mastodontes, de ne pas devenir des simples fournisseurs de contenus des GAFA et de garder leur indépendance éditoriale. C’est tout le sens du concept de « private gardens » chez nous par opposition aux « walled gardens ».

 

Propos recueillis par Luciana Uchôa-Lefebvre

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