Ad server résolument européen, Videoplaza aborde petit à petit également le programmatique avec sa plateforme supply side (SSP) Konnect et une place de marché privative en Espagne, Aunia, toutes deux lancées en 2014. Achetée depuis peu par le groupe Ooyala, l’ad tech dispose d’une forte expérience avec les chaînes de télévision, puisqu’elle réunit 50% des européennes, notamment les chaînes télé émettant via Internet et télés connectées. Elle est ainsi bien placée pour nous expliquer jusqu’où le digital et la télévision peuvent converger ou pas. La parole à Frederic Dumeny, directeur régional de Videoplaza pour l’Europe du Sud.
Travaillant déjà en tant qu’ad server vidéo (Karbon) de chaînes télé, éditeurs et régies européens depuis un certain nombre d’années, vous vous êtes lancés de manière franche dans le programmatique notamment avec la création de votre SSP Konnect, l’année dernière. Pour démarrer, pouvez-vous nous dire deux mots sur Karbon et sur Konnect ?
Karbon est notre outil d’ad-serving vidéo multi-terminaux. Il permet de livrer des campagnes vidéo instream et outstream (intext) sur tous les terminaux, du web au mobile et à la tablette, en passant par les télévisions connectées, les box opérateurs, les consoles de jeu, Apple TV, Chromecast etc… Plus de la moitié des chaînes de TV en Europe l’utilisent. Konnect est notre SSP qui permet de brancher sur Karbon (ou sur un autre ad-server) toutes les sources RTB et les DSP du marché. Aussi bien pour monter des marketplaces ouvertes ou fermées que pour gérer des projeta deals.
Nous savons que l’adoption des technologies programmatiques pour l’offre d’inventaire vidéo en ligne est en développement. Connaissant votre relation assez forte avec des chaînes télé – et non seulement donc avec des sources d’inventaire vidéo sur le digital – pouvez-vous nous expliquer ce qu’il est possible de faire aujourd’hui avec l’inventaire télé en Europe pour la diffusion de campagnes de manière automatisée ? Je parle là bien d’inventaire de télé connectée (IPTV) ou diffusée via Internet et non pas du web ou du portable.
Si nous parlons de diffuser en programmatique sur la TV « classique », cette partie du marché est à peine naissante. En partie à cause des législations locales mais aussi du fait des pratiques d’achat. Les annonceurs TV pensent en termes de GRP, ce n’est pas encore le cas pour le digital. Ceci dit notre ad-server livre aussi certains de nos clients pout leur publicité « antenne ».
Quel type de donnée peut être exploité par l’éditeur pour créer ses segments d’audiences ? Qu’est-il possible de proposer aux annonceurs en termes de ciblage personnalisé ?
Tout dépend si l’éditeur est équipé d’une DMP ou pas. C’est lui qui met à disposition de la demande les données et les segments qu’il souhaite, cela ne dépend pas du SSP. Ceci dit, notre architecture permet de connecter à peu près n’importe quel DMP et de dédupliquer les données. C’est le sens que prend le marché.
Aujourd’hui le programmatique touche essentiellement les inventaires vidéo en ligne en France. En discutant avec TF1 Publicité ou bien FTP, on se rend compte que l’on est encore très loin d’une introduction sur les ad exchanges de l’inventaire télé classique, en IPTV et même en VOD ou par satellite ou câble. Quels sont les freins à ce changement ? Jusqu’où la vidéo en programmatique peut-elle aller en France ? Quand pourra-t-elle atteindre l’inventaire télé classique ou connecté ?
Encore une fois, ceci est très dépendant des habitudes marché et des législations locales. Tout le monde regarde le sujet, nous sommes prêts en termes techniques à lancer des tests en France. Le sujet légal doit être éclairci.
Avec le programmatique, qu’est-ce qui change en termes de ciblage et de mise en place de campagnes si l’on compare aux pratiques traditionnelles sur la télévision ?
Le ciblage est forcément plus fin en programmatique puisque l’annonceur achète impression par impression et choisit précisément l’inventaire qu’il souhaite et qui répond à ses objectifs de campagne. En revanche, la télévision est un média de masse, les achats sont basés sur le GRP. Pour le moment ces deux mondes, même s’ils se rapprochent, ils restent distincts.
Pour ce qui touche la notion l’inventaire vidéo en ligne accessible sur les ad exchanges, quelle est votre analyse sur ce marché en Europe : l’offre d’inventaire est-elle satisfaisante à la fois en termes qualitatifs et quantitatifs ? En deux mots, éditeurs et annonceurs y trouvent-ils leur compte dans un contexte où la consommation de vidéo est en hausse constante et partout ?
L’inventaire vidéo disponible est quasiment illimité grâce à des sites comme Youtube, mais les inventaires de qualité sont rares et c’est clé pour l’avenir du marché. De grands annonceurs se sont plaints la semaine dernière d’être en pré-roll sur des vidéos de propagande de DAECH sur YouTube. Cela ne peut pas arriver avec l’inventaire de nos clients. L’inventaire premium est encore rare puisque les principaux éditeurs ne se sont pas encore pleinement lancés sur le programmatique. En effet leurs fill rates et leurs CPM étant déjà conséquents sur les ventes traditionnelles, ce qu’ils attendent du programmatique c’est plus d’optimiser leur yield management plutôt que d’élargir l’éventail de la demande.
Pensez-vous qu’il faut à tout prix continuer de réserver de l’inventaire au garanti ? Le « premium » d’après vous peut-il arriver sur les ad exchanges ? Pourquoi ?
Nous avons lancé l’année dernière Aunia en Espagne. Aunia est une place de marché programmatique qui regroupe les inventaires vidéo des groupes AnteneTRES et Mediaset, les principales chaînes privées. Et cela marche très bien ! Les CPM sont maintenus, les annonceurs on confiance et le marché se développe. Donc oui, s’il est mis en valeur, non seulement le premium peut arriver mais cela peut représenter à court terme un levier de croissance important pour les éditeurs.
Si l’on prend en compte toutes les sources d’inventaire vidéo – desktop, mobile, télé classique… – et le fait que le consommateur européen soit devenu multi-écrans, comment mettre en place une campagne vidéo personnalisée qui soit bien calibrée ?
C’est exactement ce que fait Karbon, notre ad-server, depuis cinq ans : lisser la livraison des campagnes sur tous les terminaux pour optimiser la charge de chaque support et suivre les utilisateurs lors de leur expérience multi-écrans.
Les réflexions et les débats au sujet de la visibilité de la publicité en ligne n’ont jamais été aussi intenses. Pour ce qui est de la publicité vidéo où est le problème d’après vous ? Comment la garantir ? Comment la mesurer ?
Des acteurs s’en sont fait une spécialité, Mediamétrie prévoit de l’intégrer à la mesure GRP et c’est plus que bienvenu ! Ce marché a besoin de contrôle de la valeur. Nous avons intégré tous ces acteurs à Karbon.
Quelles surprises 2015 réserve au secteur de la pub vidéo d’après vous ?
Difficile de répondre par définition ! Mais je pense que les gros sujets seront autour de l’arrivée massive des annonceurs TV sur le digital vidéo une fois qu’ils seront rassurés sur la qualité des inventaires et qu’ils auront des métriques équivalentes à celle de la télévision.
Qu’est-ce qui a changé pour vous depuis votre acquisition par Ooyala ?
Beaucoup de choses ! D’abord, nous ne sommes plus une start-up et avons les moyens de regarder l’avenir sereinement. Nous doublons par exemple le nombre de nos ingénieurs. Mais, surtout, intégrer Ooyala nous permet d’élargir notre champs de vision : jusqu’ici nous fournissions les outils pour monétiser les inventaires, aujourd’hui nous participons à faire croître ces inventaires.
LUL