Le marché du RTB se développe à toute vitesse en France, suivant le Royaume-Uni et les Etats-Unis (voir, par exemple, notre article sur les dernières estimations prévoyant une croissance moyenne en France du RTB de 49,7% entre 2010 et 2017). Cette performance est une preuve irréfutable que les acteurs plébiscitent de façon grandissante cette nouvelle façon de faire de la publicité sur l’univers digital. Mais en même temps, beaucoup de questions se posent encore sur l’efficacité et les résultats du RTB et, plus largement, de la publicité digitale. Il suffit, par exemple, de penser à toutes ces études sur la visibilité réduite des impressions dont on vous parle souvent (pour illustrer, 54% des bannières ne seraient pas vues selon l’infographie d’Infectious Media que nous avons publiée hier) ou encore sur les fraudes autour de fausses impressions générées par des robots, entre autres.
Pour essayer de mieux comprendre les principaux enjeux du RTB en cette rentrée 2013 bien entamée, nous avons décidé d’interviewer ensemble trois entreprises partenaires, chacune s’occupant d’un maillon différent de la chaîne. Tout d’abord, le groupe 1000Mercis, positionné sur le marketing relationnel et la fidélisation, qui s’est lancé dans l’aventure du RTB il y a un an et qui semble très enthousiaste au sujet des résultats « extrêmement encourageants » du programmatique. A ses côtés, le fournisseur américain de technologie pour les plateformes de vente et d’achat en RTB Appnexus, qui travaille en ce moment même sur le lancement d’une offre pour le mobile, actuellement en phase test. Enfin, l’entreprise française d’analyse et de mesure de la performance et visibilité des campagnes digitales, Alenty, elle aussi conquise par le programmatique, qui aujourd’hui lui vaut plus de volumes d’impressions analysées et contrôlées que via le système premium, en plus de booster son développement à l’international, notamment au Royaume Uni.
Le RTB : quels travers ?
Permettre aux annonceurs d’augmenter leur ROI en affichant des messages personnalisés à l’instant T où les internautes émettent un besoin ? Oui, le RTB le peut, nous le savons, et les bénéfices de ce système sont multiples. Mais si nous nous arrêtions aux informations concernant la visibilité et les fraudes, nous pourrions alors nous interroger, après tout, sur les travers du RTB.
Le premier travers nous est indiqué par Laurent Nicolas, fondateur et président d’Alenty : l’automatisation des achats nous empêche de vraiment maîtriser la qualité des inventaires, contrairement au modèle premium et traditionnel, où un contact individuel est établi entre l’annonceur et l’emplacement. « On est obligé de faire confiance à un système entièrement automatisé », explique-t-il, ce qui peut en effet réserver de très mauvaises surprises, par exemple, lorsque l’on apprend que l’impression a été mal affichée, voire pas du tout. Mais pour le pdg d’Alenty, et il est bien placé pour l’affirmer, c’est bien aussi le RTB qui rend viable une solution à ce problème – elle consiste à automatiser les outils d’analyse, de mesure et de contrôle de la visibilité, qui permettent à l’annonceur, entre autres, de blacklister les sites dont la performance de visibilité s’avère mauvaise.
Le second travers consiste à afficher le RTB comme une simple technologie d’achat média, défend Thibaut Munier, directeur général du groupe 1000Mercis. Pour lui le RTB est bien plus, puisqu’il a engendré deux révolutions, celle de l’achat aux enchères en programmatique, mais aussi celle – encore plus stratégique pour son groupe – de permettre à l’annonceur de « choisir à qui on parle », ce qui change tout… En effet, le système est fait de telle sorte que la publicité aura tendance à correspondre au mieux à l’internaute à qui elle est adressée, explique Stéphane de Blic, Senior Account Manager d’Appnexus. « Le RTB permet d’évaluer en temps réel chaque impression en fonction du moment de la journée, du site et de toutes les informations que l’annonceur peut avoir sur l’internaute qui regarde cette page », il complète.
Voilà comment on finit très vite tout de même par migrer des travers vers les bénéfices du système… Mais alors comment s’assurer d’une stratégie réussie, lorsque l’on souhaite rentrer dans le RTB ?
Eléments pour une stratégie réussie
Les composants indispensables sont au nombre de trois, pour le DG de 1000Mercis : tout d’abord, disposer d’une base de données intelligente – une DMP – si l’on souhaite être performant et pertinent, car tout repose désormais dans la capacité pour les marques de vraiment cibler les bonnes personnes au bon moment ; ensuite, s’assurer d’un bon trading, car « l’enjeu d’une présence en RTB est de mieux acheter »; enfin, faire une priorité de l’étude et de l’analyse, non seulement de ses campagnes mais aussi de l’environnement et des multiples questions que cette technologie soulève, car « le RTB est un accélérateur » et son écosystème est encore très ouvert, nous rappelle Thibaut, avec beaucoup d’acteurs, de l’innovation, de l’effervescence et de la création.
En parallèle, les marques peuvent également développer différentes stratégies pour améliorer leur visibilité dans le système, rappelle Laurent, d’Alenty, en évoquant l’étude que sa société a réalisée sur le rapport qualité/prix d’inventaires. Selon cette étude, alors que les sites permettant une très bonne visibilité sont chers, les emplacements de « deuxième type », à des prix très abordables comparativement aux premiers, peuvent offrir des résultats extrêmement variables, avec des taux de visibilité de 0 à 70%… « La visibilité n’est donc pas assurée par le prix que l’on va payer », mise à part dans le cas des sites très chers. Selon lui, l’optimum en RTB se situerait à un taux de 60% des publicités vues. En deux mots : il faut ainsi analyser et intégrer des outils permettant d’intervenir dans le choix des sites, afin de se focaliser sur les meilleurs emplacements.
Côté technologie, les propriétaires sont importantes pour permettre aux acteurs de se différencier sur le marché, affirme Stéphane, d’Appnexus. Le souci est qu’il est laborieux de réaliser toutes les intégrations entre DSP et SSP, alors qu’une DSP doit pouvoir se connecter au maximum de SSP. Le choix d’Appnexus est de fournir une plateforme de base, égale pour tous, mais qui permet à chaque client d’y ajouter sa touche personnelle. « Chaque client développe sur notre base sa propre techno afin de tirer au mieux parti de ses propres atouts. »
Côte inventaire, enfin, le développement de private deals et d’ad-exchanges privées, en parallèle aux places de marché ouvertes, est considéré bénéfique à priori pour tous – annonceurs, éditeurs et internautes, en somme, pour l’environnement du RTB lui-même. Un avis partagé par nos trois interlocuteurs. Les éditeurs ne seraient donc pas les seuls gagnants, car ces techniques sont rassurantes pour les annonceurs au sujet de la qualité des inventaires qui leur sont proposés.
L.U.L.