Nous donnons suite à notre tour des acteurs de l’industrie de la publicité programmatique en France pour recueillir leurs avis et retour d’expériences au sujet de la technologie du header bidding, qui permet aux éditeurs de mettre en concurrence les différentes sources d’achat de leur inventaire. La parole à Edgar Baudin, CEO du trading desk indépendant Gamned.
Le métier du trading desk indépendant Gamned est justement celui d’acheter de l’inventaire pour le compte de ses clients annonceurs au sein des ad exchanges. Que pensez-vous des éditeurs qui ont recours au header bidding ? Quel impact cela engendre dans vos activités ?
Le header bidding permet aux outils programmatiques de voir un inventaire auquel ils n’avaient jusqu’alors pas accès. C’est une étape importante dans la reconnaissance des achats programmatiques comme un mécanisme qui apporte de la valeur à tout l’écosystème. Le CPM programmatique va augmenter pour les acteurs qui pourront accéder à cette demande, mais pour la bonne cause : il augmentera par l’ajout d’inventaires qui sont réellement valorisés à ce prix par les acheteurs. Cependant l’effet global est plus incertain car en ponctionnant en amont (header) des impressions, le publisher ne laissera que des impressions de moins bonne qualité pour les partenaires qui ne sont pas branchés dans le header bidding et qui enchérissent sur les tags standards – opérés par un autre adexchange ou SSP.
Pensez-vous que ce système est si révolutionnaire que certains acteurs de l’industrie et médias semblent le croire ? Pourquoi ?
Sans rentrer dans les détails techniques, rappelons qu’en matière de programmatique, le diable est dans le détail, et que l’implémentation du header bidding est encore loin d’être standardisée. De ce fait, il est difficile de faire rentrer en compétition tous les acheteurs sur un même outil (véritable yield management). Pour plus de détail, vous pouvez lire l’article du cofondateur d’Appnexus Mike Nolet (ici) ou d’Adops Insider (là). Le header bidding est un beau pas dans la direction d’un achat transparent et complètement automatisé, mais ce n’est pas encore la panacée. Des solutions promettent de fusionner l’adserver primaire et l’adexchange à l’image de l’annonce d’Appnexus sur son offre publisher suite, mais celle-ci est encore trop récente pour avoir de vrais retours d’expérience.
Les analystes mettent en avant le fait que les éditeurs seraient encore perdants dans le schéma actuel de fonctionnement des ad exchanges. On dit que le marché reste encore très fragmenté et compliqué avec des inventaires proposés en parallèle sur plusieurs plateformes différentes, toutes concurrentes entre elles. Et qu’au bout du compte l’éditeur est perdant. Qu’en pensez-vous ?
En cinq ans, l’écosystème des adexchanges est passé d’un outil de monétisation des inventaires de troisième zone pour ad networks fatigués, à un mécanisme qui traite 30% en France (chiffre SRI) et plus de 50% aux Etats-Unis du display. Sans parler du mobile et de la vidéo où sa pénétration est en très forte croissance. Les éditeurs n’adopteraient pas en masse ce type de solutions pour y mettre de plus en plus d’inventaire si elles n’étaient pas rentables. Ceci étant dit, comme dans tout changement de modèle, il y a énormément d’ajustements. Les éditeurs, dans leur manière de mettre en avant leurs audiences au-delà de leurs inventaires, ont à se réinventer pour aider les trading desks et les agences à mieux comprendre leur valeur ajoutée. De plus, les éditeurs s’équipent de plus en plus d’outils de yield management (aleph d, adomik) pour maximiser le prix de vente de chaque enchère et donc leur revenu global.
Qu’est-ce qu’il faudrait améliorer d’après vous dans les ad exchanges ?
– Plus de transparence côté vendeur sur les prix, les emplacements et les formats ;
– Plus de transparence côté vendeur, pour recréer la relation entre les éditeurs et les agences afin de mieux servir les annonceurs ;
– Plus de transparence sur les marges des outils, et des ad networks « V2 » ;
– Consolidation du secteur pour plus de lisibilité ;
– Une résistance à la fermeture des inventaires des grands groupes en mode « walled garden » pour éviter de retomber dans un système en silo.
LUL