La blockchain appliquée à la publicité est une tendance forte en cette fin d’année. Différentes initiatives se créent ici et là, dont Adschain, un consortium basé sur une architecture de type blockchain pour combattre la fraude. Lancé par Smart, Futurs.io, Mondadori MediaConnect, S4M et Dentsu Aegis Network, Adschain est en phase de proof of concept. Les annonceurs et les éditeurs y accèdent en écriture: les premiers référencent leurs DSP et agences mandataires, les seconds, les SSP en tant que leurs revendeurs autorisés. Ensuite, les mandataires et revendeurs consultent les informations de manière automatisée (accès en lecture). Ils le font en amont d’une transaction pour valider sa légitimité, un mécanisme censé sécuriser les transactions. Nous interrogeons Nicolas Rieul, directeur marketing du DSP mobile S4M pour en savoir plus.
Quel type de fraude publicitaire Adschain vient combattre ?
Nous nous attaquons à la fraude de l’url spoofing. Dans ce cas, le fraudeur se fait passer par un autre éditeur, lui générant un manque à gagner et mettant en péril la marque, qui n’est pas diffusée là où c’était prévu. Il existe déjà une très bonne initiative pour maîtriser cette fraude: ads.txt. L’idée est de pousser la logique d’ads.txt un peu plus loin.
L’initiative ads.txt ne suffit pas pour enrayer ce problème ?
Ads.txt est une très bonne initiative mais elle est ouverte à tous les sites selon une démarche déclarative. L’idée avec Adschain est d’apporter une évolution à ads.txt à travers un système fermé, basé sur un consortium. Il faut être membre du consortium pour y accéder, ce qui constitue un premier filtre important.
Le consortium Adschain réunit aujourd’hui différents maillons de la chaîne publicitaire : un éditeur, Mondadori, un SSP, Smart, un DSP, S4M et une agence, Dentsu Aegis Network. A-t-il vocation à s’ouvrir à d’autres acteurs y compris à vos concurrents ?
Bien sûr. Nous avons créé ce consortium afin qu’il représente toute la chaîne de valeur. Il faut que tous les acteurs nous rejoignent, les gros comme les petits. Nous sommes à l’étape de proof of concept, que nous souhaitons développer avec un premier annonceur. Si cela fonctionne, d’autres acteurs voudront nous rejoindre. Aujourd’hui beaucoup d’initiatives sont créées par des fournisseurs de technologie. Là c’est différent, c’est une solution qui a vocation à être partagée à travers une gouvernance établie entre ses différents membres, un peu comme une association professionnelle. D’ailleurs à terme une organisation professionnelle pourrait gouverner Adschain.
Comment fonctionne ce consortium ?
C’est un cas d’usage qui est très simple : la blockchain ici réunit des registres qui nous permettent de vérifier si l’annonceur est bien compatible avec l’éditeur. C’est au moment de l’achat que l’on réalise cette vérification. Futurs.io nous accompagne car les entreprises de l’adtech ne disposent pas d’expertise en blockchain. En traitant cette question, nous touchons aussi au sujet de la transparence. En revanche cette technologie ne s’adapte pour l’instant pas au programmatique. Elle ne peut pas aller aussi vite pour traiter toutes les bid requests.
Etant donné cette incompatibilité de vitesse de traitement, doit-on conclure que la blockchain sera toujours d’un usage limité en publicité automatisée ?
Pour le moment, mais demain on trouvera des protocoles blockchain qui pourront répondre à ce besoin.
Pour résumer, tous les membres du consortium participent à une même chaîne de contrôle et d’enregistrement de données. Lorsqu’un participant achète ou vend de l’inventaire sur les ad exchanges il peut opérer cette vérification supplémentaire, ce qui suppose que l’annonceur lui aussi y participe.
Exactement. Il active Adschain et il ne diffuse que dans cet univers qui est protégé. On démarre petit, mais l’idée est que d’autres éditeurs nous rejoignent afin que la chaîne gagne en puissance.
Avec quels annonceurs testez-vous la chaîne ?
Nous cherchons encore notre premier annonceur, nous sommes en discussions mais rien n’est confirmé pour le moment.
Qui paye la note ?
Aujourd’hui nous partageons nos efforts avec futurs.io. C’est du temps/homme, et chaque membre du consortium participera à ses coûts. Quand on validera le concept, on réfléchira au modèle économique.
Propos recueillis par Luciana Uchôa-Lefebvre