Les bannières publicitaires s’achètent et se vendent de plus en plus aux enchères comme un article de seconde main sur eBay. Jusqu’ici la vidéo semble encore un peu épargnée, en raison du faible volume d’inventaire et de barrières techniques. La citadelle va bientôt tomber et entrer dans l’univers du programmatique. La vidéo est autrement plus complexe que les bannières, que ce soit sur mobile ou bien sur le desktop. Le plus important acteur dans le secteur de la vidéo, Google, avec l’inventaire de Youtube, a triplé l’inventaire disponible sur son ad-exchange, y compris pour la vidéo. Dans le secteur de l’automobile et de la distribution, les annonceurs ont multiplié par 4 leurs investissements, selon Rany Ng le directeur de DoubleClick Product Management.
En 2013, le marché de la vidéo en ligne passant par un mécanisme d’enchères et temps réel va exploser : + 71% à 686 M$ selon Forrester. Le marché devrait dépasser 1,1 Mds$ dès 2014. C’est encore une goutte d’eau si on regarde l’ensemble des budgets investis pas les agences et annonceurs dans la vidéo : le marché est estimé à 4,6 Mds $ en 2013 et 4,6 Mds $ pour l’année prochaine. Les acteurs de web comme Google, Yahoo, DailyMotion, Microsoft ou AOL mettent une part importante de leurs inventaires même premium sur des places de marché ouvertes. D’un autre côté, les chaînes de TV et autres acteurs provenant de l’univers de l’édition comme Turner aux USA mais aussi Canal Plus, M& ou TF1 tournent le dos aux ad-exchanges. Même l’américain Hulu s’est lancé dans le programmatique depuis 2012. Au lieu d’ouvrir son inventaire à tous les annonceurs, il faut montrer patte blanche pour avoir le privilège d’enchérir sur l’inventaire de Hulu sur des publicités pre-roll qui précèdent les séries. L’idée est d’éviter de cannibaliser la vente directe. Pour ce faire, le prix sur les ad-exchanges serait toujours supérieur à ceux proposés par les équipes commerciales.
D’un autre côté, il y a les éditeurs de vidéo premium qui souhaitent automatiser le vente de leur inventaire vendu en « direct ». C’est surtout le cas des chaînes de télévision. Outre-atlantique, NBC explore cette option qui permettrait à ses commerciaux de négocier des conditions spécifiques pour chaque annonceur pour ensuite automatiser le processus de mise en oeuvre des IO (bons de commandes). Cela permet de garantir à l’annonceur que la campagne sera livrée et de ne pas avoir le risque de perdre les enchères, même au sein d’un cercle fermé d’annonceurs. En France, plusieurs acteurs nous ont confirmé leur intérêt pour ce genre de pratique. Il ne serait pas impossible de voir certains acteurs sortir du bois en 2014. TubeMogul et LiveRail sont les acteurs les mieux positionnés sur ce segment. Le premier met aux enchères plus de 44 millions de spots publicitaires chaque jour, soit plus de 1 milliard par mois.
Est-ce que le programmatique va prendre la main sur la télévision ? Oui et Non. En effet, l’opérateur de services de télévision par satellite DirectTV a déjà commencé à automatiser la vente d’une partie de ses spots de pub (voir notre article sur le sujet). En revanche, ce n’est pas demain que les spots de TV seront vendus par TF1 en programmatique, qui n’est pas adapté aux négociations annuelles. Demain peut-être pas, mais après-demain sans l’ombre d’un doute.
Pierre Berendes