Suite de l’interview d’Anne de Kerckhove, Directrice Générale de Videology pour les pays EMEA. Pour lire la première partie, cliquez ici.
Vous venez d’annoncer l’intégration de votre plateforme DSP avec la plateforme SSP Stickyads qui rassemblerait plus de 50 places de marché privatives européennes. Pourquoi avoir pris cette décision ?
Le rôle d’une technologie vidéo c’est d’être aussi agnostique que possible et d’offrir le plus d’inventaires premium à ses clients. Notre job est de s’intégrer avec le plus grand nombre d’acteurs que possible. Nous avons une relation ancienne avec Stickyads et nous sommes très contents de leur travail. Ce sont de très bon partenaires pour nous, vu notamment leur relation avec des éditeurs premium : nous travaillons du côté du branding premium, eux aussi, c’est exactement ce qu’on recherchait.
Tout en étant une plateforme DSP vous aviez également une offre du type SSP depuis fin 2012 environ. Vous avez donc une vision complète. Quel est aujourd’hui d’après vous l’état de l’offre vidéo sur les ad exchanges en France ? Et de la demande ?
Nous avons vécu une année 2014 et un début 2015 très riches, avec beaucoup d’acteurs de la télévision venant se mettre dans la vidéo programmatique, généralement en passant par des deals ID et des places de marché privatives. C’est bien pour l’industrie : il nous faut de plus en plus d’acteurs premium puisque c’est bien celle-là la demande des acheteurs. Il y a encore cependant un trop important manque de transparence sur ce marché et des comportements vieillots du type adserver.
Que voulez-vous dire par des comportements vieillots ?
Il y a dix ans les ad networks mélangeaient du premium avec un peu n’importe quoi pour arriver à des prix accessibles. Nous ne voulons plus cela. Les marques veulent savoir exactement où sont-elles diffusées. Nous devons être hyper clairs et transparents et ce n’est pas encore le cas de tout le monde.
Concrètement, est-ce que cela passe par donner l’adresse URL de l’impression ?
Oui. Pourquoi pas ? Le programmatique a malheureusement intégré cette règle de l’url cachée. Mais pourquoi la cacher ? Les annonceurs achètent un cadre de diffusion média. Notre travail est de leur apporter l’efficacité mais également la transparence.
L’affichage de l’url ce n’est donc toujours pas une obligation ?
Nous l’exigeons, nous affichons l’url. Nous travaillons en complémentarité avec des acteurs tels que Stickyads et LiveRail et nous leur demandons de la transparence.
Malgré le développement de l’offre d’inventaire vidéo, il semblerait que le qualitatif reste le domaine du direct. Quel est votre avis ?
En effet, tant que l’on ne sera pas totalement transparent, la publicité vidéo restera dans le domaine des achats directs. Toute la lutte de Videology est de dire qu’il n’y a qu’une plateforme, avec du contenu vérifié url par url. Il faut que la filière soit complètement sécuritaire. Videology ne travaille que le branding et dans la vidéo, avec des acheteurs télé qui transfèrent leurs exigences télé sur le digital, ce qui est normal et heureusement qu’ils le font. Nous devons répondre à ces exigences.
Pour un éditeur, quel intérêt d’offrir aux ad exchanges ses impressions vidéo ? Quelle stratégie privilégier ?
Nous ne sommes pas un ad exchange mais une plateforme programmatique. Le programmatique offre de l’efficacité aussi bien à l’annonceur qu’à l’éditeur. En réalité, il est là pour aider le consommateur et son expérience. Un consommateur heureux c’est une marque heureuse et un éditeur heureux. Cette efficacité d’expérience publicitaire est fondamentalement l’efficacité de l’expérience du consommateur.
Quel est votre critère d’impression visible ? Faut-il suivre le standard de l’IAB ?
On a le standard de l’IAB, alors il faut le suivre. Mais c’est le début du critère pas la finalité. Un annonceur ne veut pas que seulement trois secondes mais que toute sa vidéo soit vue. Quel que soit le standard, notre travail est d’être bien au-dessus du standard et de nous assurer que la publicité soit vue jusqu’à sa fin.
Facturez-vous les vidéos vues ou les vidéos affichées ?
Nous avons tendance à facturer au CPM. Mais nous faisons ce que l’annonceur souhaite. La plupart demande un coût au CPM mais avec des KPIs de vidéos vue entièrement.
Que pensez-vous de la possibilité d’échapper à une pub vidéo ? Une publicité doit-elle être imposée systématiquement ?
Si on veut rester dans un milieu où l’on finance un contenu on est obligé de les imposer. Le contenu ne peut pas être crée sans un modèle économique qui le soutienne. Cela fait plus de 50 ans que la télévision fonctionne avec une publicité que le consommateur accepte. Du très bon contenu coûte très cher à produire. Et les gens veulent de plus en plus de qualité. Cette industrie qui vit une explosion de production de qualité en ce moment n’est possible que si elle est financée.
Une importante étude dévoilée récemment (White Ops/ANA) a démontré que les réseaux des fausses impressions infectent encore plus les impressions vidéo que les bannières classiques, où c’est déjà un fléau : sur les 5,5 milliards d’impressions analysées, presque un quart (23%) de toutes les publicités vidéos servies et 11% des bannières l’ont été par des robots. Ce problème est certes plus fort sur les places de marché programmatique mais des niveaux significatifs de robots ont été observés sur des opérations d’achat direct et sur tout type d’éditeurs, y compris les premium. Quelle est votre réponse à ce phénomène ?
Je suis contente que l’on reconnaisse ce problème. On travaille depuis six mois avec White Ops, en les faisant systématiquement contrôler notre inventaire. C’est un travail technologique mais aussi un travail de publisher. On a une vraie responsabilité de travailler avec les éditeurs pour leur notifier les url qui posent problème pour qu’ils fassent leurs recherches aussi de leur côté. Il est possible d’offrir un cadre de diffusion avec le niveau de fraude le plus bas. Les robots évoluent, mais les technologies de contrôle aussi.
Y a-t-il toujours un niveau de fraude ?
Oui, mais vous pouvez le maintenir très bas. Cependant il faut être très exigeant et avoir une relation de qualité avec les éditeurs pour les alerter. Le travail d’équipe avec nos éditeurs est essentiel.
Très bas veut dire quoi ?
Cela dépend des marchés. En France, nous observons des taux bien plus faibles que ceux observés aux Etats-Unis. Nous pouvons atteindre des taux de 1% à 2%, mais suite à un travail de contrôle tel que celui que nous déployons. Si nous ne faisions pas ce travail, nous serions à des taux beaucoup plus élevés. Nous rejetons énormément de nos impressions.
Propos recueillis par Luciana Uchôa-Lefebvre