Décidément, le programmatique semble générer des effets considérablement vertueux au bénéfice des éditeurs qui s’y mettent, quand cela se fait dans le cadre des places de marché privées. À en juger par le retour d’expériences que Samuel Profumo, directeur de l’optimisation des revenus de Figaro Médias, a bien voulu partager avec nous. D’emblée on apprend avec lui que, grâce à La Place Média, place de marché privée sur les ad-exchanges, Figaro Médias a constaté une augmentation significative à la fois de son chiffre d’affaires et du CPM de son inventaire donné en programmatique, et une nette amélioration de la transparence de ce qui en est fait. La régie du groupe Figaro est l’un des cinq membres fondateurs de La Place Média, lancée l’été 2012.
La différence est qu’avant, la régie comptait sur les ad-networks pour faire du programmatique. « Nous avions des deals de gré à gré avec les principaux ad-networks du marché ainsi qu’avec les retargeteurs », nous explique Samuel. « En nous plaçant sur les ad-exchanges dans le cadre de La Place Média nous avons eu accès à une demande bien supérieure à celle que nous pouvions traiter avant », dit-il. Résultat : alors qu’avant entre 20% et 30% de l’inventaire proposé au programmatique demeuraient toujours invendus, désormais rien ne reste. Au contraire, la demande est telle, que le CPM est valorisé.
Le changement est de taille pour cette régie où la vente en direct dite « premium » est extrêmement valorisée et au cœur des stratégies. Car, cette règle d’or reste de mise : d’abord l’inventaire est proposé aux annonceurs dans le cadre d’une relation directe entre les équipes de vente et les annonceurs ; ensuite, ce qui n’est pas vendu est basculé en programmatique. Mais tandis qu’il y a encore peu de temps, le programmatique était une affaire de vente d’invendus exclusivement, désormais on commence tout doucement à admettre qu’il faut peut-être repenser les stratégies d’yield management d’une façon plus globale, et pour cause : l’inventaire sur certains sites où la marque média est moins forte est valorisé au point de parfois concurrencer en quelque sorte l’offre premium garantie. «Cela peut arriver que sur certains sites la valorisation atteigne des CPM comparables au prix du modèle garanti, ce qui nous invite à nous poser des questions sur l’avenir au sujet d’une version yield globale concernant l’ensemble des deals. On ne répond pas encore à cette question, mais elle se posera », déclare Samuel.
Le programmatique n’est plus forcément le moins cher
« Désormais, il y a une partie des campagnes sur les ad-exchanges qui achète aussi cher que quelques campagnes premium sur certains sites, ce qui pose une vraie question de savoir comment optimiser cette frange de recoupement (« yield holistique ») », nous explique Samuel. Pour tenter d’illustrer ce changement, en prenant des chiffres hypothétiques, avant la création de La Place Média, les prix pouvaient tourner entre 0,50€ et 2,00€ via les ad-networks, alors qu’ils étaient systématiquement supérieurs en premium garanti (vente en directe). Désormais, les tarifications peuvent se recouper, puisque les prix en programmatique via La Place varient entre 0,50€ et plusieurs euros.
La mécanique de cette valorisation, possible grâce à La Place Média, est très intéressante et somme toute assez simple. Le fait de proposer de l’inventaire dans un environnement après tout « fermé », celui de la place de marché, où ne s’y trouvent que des éditeurs identifiés dotés d’un pilote – le directeur de La Place Média – confère à la régie une garantie de protection du prix des inventaires. « Nous discutons au sujet des prix planchers en comité de pilotage, mais c’est bien La Place Media qui en a le contrôle, en les pilotant en accord avec nous. L’idée est de protéger une partie des inventaires des éditeurs et de s’assurer qu’elle est vendue au prix que l’éditeur souhaite accepter, afin que l’on ne brade pas un inventaire de grande qualité. »
Une logique programmatique de valorisation fait donc ses pas, mais sans pour autant atteindre la stratégie premium de façon négative ou cannibalisante. Bien au contraire, son impact est vertueux, car elle entraîne les équipes premium dans une dynamique de quête constante d’innovation afin de proposer des services et bénéfices supplémentaires aux annonceurs, que le programmatique ne pourrait pas offrir.
En fin de compte, les logiques se complètent, l’intérêt pour Figaro Medias étant d’apporter une réponse adaptée à chaque segment de demande, vu que selon chaque site, et selon les périodes, les situations peuvent varient du tout au tout. Par exemple, sur lefigaro.fr, moteur du groupe sur le digital, où la vente en garanti est toujours majoritaire, pas une seule impression ne « reste » disponible au programmatique en période de fin d’année. L’annonceur a dans ce cas tout intérêt à garantir sa présence. « Pour être sûr et certain, il faut aller sur du direct, où l’on aura le contexte et les formats. » Sur d’autres sites ou applications, comme La Chaîne Météo, la vente en programmatique est très adaptée et fait monter le CPM.
Innovation pour le premium garanti : une DMP propre à la régie serait-elle en route ?
Parmi les solutions innovantes cherchant à captiver les annonceurs à des offres premium, désormais en partie « challengées » par le programmatique, Figaro Medias nous cite les thématiques de la data, des formats innovants et des opérations spéciales.
Concernant la data, la régie vient de lancer l’offre FIGData avec Nugg.ad qui propose des segments d’audience qualifiée avec du ciblage prédictif. Un tour de marché a déjà été réalisé par le Groupe Figaro fin 2013 pour évaluer les différentes technologies et offres de solutions du type DMP, sans pour autant cependant qu’une décision ait été prise. L’objectif est « de proposer plus de data », en d’autres termes, segmenter davantage leur propre audience afin de proposer aux annonceurs des cibles qualifiées en interne. « Le Figaro doit adresser trois enjeux de taille : proposer, via la régie, une data de qualité aux annonceurs ; des services différents à ses internautes, grâce à la data et à la connaissance que la régie dispose sur eux ; et enfin faire profiter de cette data les sites e-marchands membres de la régie pour qu’ils puissent mieux cibler leurs prospects et clients. »
Figaro Medias est très mobile. La régie publicitaire du groupe Figaro, réunissant les marques Figaro, mais aussi Evene.fr, La Chaine Météo, TV Magazine, Sport 24 entre autres, a son volet digital déployé sur tous les écrans, puisque, outres ses différents sites web, elle dispose de 18 applications sur mobile et 14 applications sur tablettes. Et que dire donc du mobile programmatique et de l’offre mobile de La Place Média, dévoilée en juin 2013 ?
Les « premiers résultats sont encourageants ». En d’autres mots, cela veut dire que l’activité est naissante, nouvelle, avec un certain nombre d’aspects qui devront être simplifiés à terme. « Nous espérons que demain, la possibilité de travailler le mobile sur La Place Média nous permettra de propager des standards d’achat, des bannières notamment, et tirer vers le haut la croissance des marchés », résume le directeur de l’optimisation des revenus de Figaro Médias.
L.U.L.