Suite de l’interview de Matthieu Betton, directeur commercial Europe de Sojern. Pour lire la première partie, cliquez ici.
Vous étudiez en les croisant l’ensemble de données des différents acteurs de l’écosystème du secteur du voyage (vos partenaires data) pouvant présenter des opportunités pour vos clients. Ces données-là sont des cookies que vous achetez pour ensuite les croiser et les analyser. Tous vos fournisseurs de données sont d’accord pour que vous les utilisiez ensuite comme bon vous semble ?
Ces ventes sont faites en direct, ce qui fait que l’environnement est très protégé pour ces partenaires data. Le cadre de diffusion est hyper clair et propre. Nos partenaires data déterminent auprès de quels annonceurs nous pouvons utiliser leurs données. Le processus est très dynamique. Notre objectif est de servir une publicité en temps réel tenant compte d’où se trouve l’utilisateur dans son parcours d’achat voyage. On doit identifier non seulement les utilisateurs susceptibles de s’intéresser par une promotion donnée mais aussi et surtout le bon timing pour leur afficher le message. Quelqu’un qui aujourd’hui effectue ses recherches sur des sites de comparateurs de vols sera dans deux jours très probablement concentré sur un autre besoin totalement différente. Surtout s’il a déjà conclu la réservation ! Ce qui est fondamental pour ce secteur du voyage est la multiplication des touch points. Entre le moment où l’on rêve de partir en vacances et le moment où on réserve son voyage il y a en moyenne de 30 à 35 touch points, autant d’indices et de traces que l’utilisateur laisse derrière lui au fur et à mesure où il mûrit sa décision de partir. L’aspect real time est ici bien plus important que dans d’autres secteurs.
Collectez-vous des données dans les applications aussi ?
Nous sommes de plus en plus dans une logique cross-device. Nous avons donc aussi des données in-app pour compléter la vision cross-device.
Utilisez-vous des adresses IP ou des données de géolocalisation ?
Non.
Dans quelle mesure sentez-vous concernés par la réglementation européenne de protection des données personnelles (RGPD, lire ici notamment) qui entrera en vigueur prochainement ?
Nous nous appuyons sur l’analyse des données pour délivrer un service pertinent, nous sommes donc concernés par cette réglementation. Nous sommes 100% compliants avec toutes les régulations aujourd’hui. Tout ce qui peut permettre à l’utilisateur final d’avoir un meilleur contrôle sur le respect de l’utilisation de ses données privées est primordial.
Cela veut dire quoi concrètement ?
Nous ne savons pas encore à quoi cela ressemblera physiquement sur un site, mais la logique veut que chaque utilisateur puisse cocher les sites partenaires susceptibles d’utiliser cette information. À noter que cette information n’est pas traçable au point de la lier à une personne physique. Dans la mesure où tous nos partenaires data sont identifiables et très clairs, ce sera notre rôle de nous assurer que tous nos partenaires seront complaints le plus vite possible.
Et êtes-vous optimiste quant à l’avenir ? Pensez-vous que tous les consommateurs cocheront positivement pour que leurs données soient utilisées à des fins de ciblage publicitaire ? En d’autres mots, le RGPD ne tuera-t-il pas votre activité ?
L’utilisateur final souhaite une publicité pertinente, un message qui lui propose un produit ou service qui l’intéresse et qui soit respectueux des législations en vigueur. Il y a en effet une explosion du volume des données disponibles aujourd’hui. L’essor des objets connectés fait que cette donnée grossit mécaniquement d’année en année. Il faut s’assurer que l’utilisateur puisse contrôler l’usage que l’on en fait. D’autre part, les spécialistes de la publicité en ligne doivent s’assurer que le format, la fréquence d’exposition et la pertinence du message soient les plus précis possibles pour que cette publicité réponde aux besoins du moment des utilisateurs. C’est ce que nous essayons de faire. Dans la mesure où nous respectons la protection des données privées, que nous proposons une publicité pertinente à des utilisateurs et que nous leur permettons de comprendre la traçabilité de l’utilisation de leurs données, nous pouvons avoir un écosystème de la publicité en ligne qui soit plus sain, moins agressif et plus en adéquation avec ce que les utilisateurs souhaitent au final.
L’affichage du message se passe où ?
Nous achetons en programmatique à travers tous les canaux et devices. L’utilisateur moderne qui réserve ses vacances tend à rechercher sur mobile et tablette mais à réserver sur PC. La clé du succès ce n’est pas de les cibler en silos, mais au moment où ils sont mûrs pour recevoir le message, que la publicité soit native, vidéo, display ou sur Facebook. Nous avons un reach théorique qui est de l’ordre de 90% du web, puisque nous achetons en programmatique partout. Notre technologie se branche à DBM [Google], qui fournit le plus gros inventaire du monde. Nous travaillons directement avec Facebook. Nous explorons l’opportunité de travailler aussi avec d’autres DSP.
Propos recueillis par Luciana Uchôa-Lefebvre
(Images: Shutterstock et Sojern pour la photo de M. Betton.)