Suite de l’interview d’Alexis Marcombe, Managing Director de Media.Figaro, sur la valorisation des contenus premium à l’heure des fake news. Pour lire la première partie, cliquez ici.
Quel est votre point de vue vis-à-vis des services proposés par Facebook aux éditeurs tels qu’Instant Articles? Est-ce un outil que vous utilisez ?
A.M : Non, nous n’utilisons pas Instant Articles car nous nous méfions de ces grandes plateformes qui veulent notre bien contre notre gré. Le plus important est de produire et de diffuser notre contenu. Mais nous n’avons pas pour autant vocation à nous transformer uniquement en producteur de contenus. Aujourd’hui, nous agissons dans une logique de souveraineté : de l’impression des titres de presse à la commercialisation ou la distribution via notre réseau de reportage en passant par les technologies digitales et l’intelligence data, tout est opéré in-house par nos propres moyens. Nous nous interrogeons toujours sur la finalité et l’intérêt que cela peut représenter pour nous de diffuser nos contenus sur des plateformes dont nous n’avons pas la maîtrise. De plus, nous avons la chance d’avoir une marque suffisamment forte pour que les internautes viennent naturellement consulter nos contenus.
Paradoxalement, les éditeurs peuvent-ils tirer parti des fake news ?
A.M : Nous ne pouvons nous satisfaire de l’existence des fake news, ni les cautionner. En revanche, nous sommes contraints de faire avec et d’encourager les acteurs du digital à prendre des mesures fermes pour éradiquer ce problème de société.
La publicité display permet-elle encore de produire du contenu de qualité dans le cadre de la presse payante? (par comparaison aux abonnements)
A.M : Pour les éditeurs premium, la vente d’abonnements et la publicité restent toutes deux essentielles car elles génèrent du revenu permettant de produire des contenus suffisamment intéressants et nombreux pour créer un cercle vertueux et bénéficier d’une légitimité auprès du grand public. La publicité permet de produire du contenu au même titre que les abonnements. Si aujourd’hui le display dévisse beaucoup sur le marché ; il se porte très bien chez Media.Figaro. Sur le marché, il y a 65% de display programmatique. Sur des sites médias comme le nôtre, le programmatique représente une part de l’ordre de 20 à 30% en fonction de différents sites. Sur des sites dont la marque est moins installée, le pourcentage peut être proche des 50 à 60%. En effet, plus une marque est puissante, plus le taux de programmatique reste faible car l’appétence des annonceurs pour les supports et pour les contextes proposés restent élevés.
A l’heure du RGPD, êtes-vous inquiétés par cette nouvelle réglementation? Où en êtes-vous dans le processus de mise en conformité ?
A.M : Le RGPD peut presque nous offrir des opportunités car nos process et notre data sont internalisés. Nous sommes souverains sur l’ensemble de la chaîne de valeur et ne sommes donc pas préoccupées par des questions liées à l’usage qui serait fait de notre data par des tiers. Nous nous sommes mis en conformité sur toutes les logiques de consentement. Finalement compte-tenu de l’ensemble des dispositifs en place depuis plusieurs années, nous vivons l’arrivée du RGPD plutôt sereinement. En revanche, nous sommes plus inquiets pour les acteurs de taille moyenne qui ont externalisé beaucoup de choses contrairement à des groupes comme le nôtre.
Propos recueillis par Stéphanie Silo