Entre cookieless et consentless, les éditeurs cherchent aujourd’hui comment embrasser les nouvelles transformations de l’écosystème, sans y laisser trop de plumes. Quels sont les enjeux et les sources de monétisation actuels des éditeurs ?
Fin des cookies tiers et trafic non-consenti : les nouvelles contraintes qui pèsent sur la monétisation
En 2022, devant la fin des cookies tiers annoncée par Google et la chute du trafic consenti engendrée par le renforcement des règles de consentement (CNIL), l’objectif des éditeurs est avant tout de préserver leurs niveaux de revenus. Ils planchent notamment sur des sujets tels que le ciblage sans cookie ainsi que la valorisation de leurs données first-party ou de leurs inventaires non consentis.
“Quand l’internaute clique sur “Tout refuser”, il faut être en mesure d’avoir des alternatives pour travailler sans cookie ni consentement, exploiter au maximum les inventaires non-consentis sur lesquels il reste possible de diffuser des campagnes cookieless en gré à gré, pour libérer de l’inventaire sur l’environnement avec consentement où le programmatique est mieux rémunéré.” Magali QUENTEL-REME, Co-founder & CEO d’Opti Digital
“Avec le contextuel, on revient vers une publicité intelligente et respectueuse de l’internaute. Le contextuel prend tout son sens aussi bien sur l’inventaire consenti que sur l’inventaire non consenti qui est amené à devenir un inventaire majoritaire. Il y a tout un travail à réaliser autour de la création et de l’imagination pour exploiter le contexte et réussir à toucher sa cible de façon intelligente sans la multiplication actuelle de formats qui nuit à l’expérience utilisateurs.” Agnès FOUGERES, VP Publisher EMEA de Seedtag
La diversification des revenus : une stratégie phare pour les éditeurs
Désormais, la diversification de leurs sources de revenus est plus que jamais clé pour pérenniser leur activité. “La diversification des revenus est un enjeu vital pour un éditeur. Quand une source de monétisation se tarit, il faut compenser la chute de cette ligne de revenus. L’idéal est de veiller à ce qu’aucune source de revenu ne dépasse 25% du chiffre d’affaires”. Eric Aderdor, CEO – Horyzon
De manière générale, cette diversification repose sur une multiplication de leviers ou de sources de monétisation (vente d’inventaires display, vidéo, audio digital; notifications web, extension d’audience, packages, brand content, OPS, yield management, etc…) mais peut aussi s’appuyer sur l’expertise des éditeurs : “En disposant d’une technologie propriétaire, Prisma est en mesure de se positionner en tant que régie, et notamment d’accompagner des éditeurs externes, tel que Libération, dans le cadre de leur monétisation.” Annabelle Morizet, Responsable Monétisation de Prisma
Les abonnements et paywalls : une stratégie payante pour une partie des éditeurs
Si les abonnements s’avèrent être une solution de monétisation évidente, elle n’est pas adaptée à l’ensemble des éditeurs. Les éditeurs premium ou spécialisés (ex : site à destinations des passionnés de foot, etc.) qui proposent du contenu de qualité et des informations exclusives sont les plus à même d’en tirer parti : “Les abonnements représentent notre principale sources de revenus mais la monétisation de formats qui n’impactent pas l’expérience utilisateur ou encore l’open auction, le programmatique garanti et les preferred deals qui nous permettent d’exploiter notre data first party, sont autant d’opportunités de rémunération.” Pierre-Yves Robert, Responsable Monétisation data – Les Echos / Le Parisien
Les paywalls représentent également un moyen de favoriser les abonnements mais là encore, cette stratégie sera plus concluante si le contenu de l’article bloqué est unique.
Le programmatique et le header bidding : des incontournables
Grâce au header bidding, les éditeurs sont en mesure de tirer un maximum de revenus de la mise en compétition des acheteurs, à condition d’adopter les bonnes stratégies et notamment de rationaliser le nombre de partenaires (une tendance en contradiction avec les anciennes pratiques des éditeurs).
“Quand le header bidding est arrivé, les éditeurs ont commencé à brancher des dizaines de partenaires en programmatique pensant maximiser leurs revenus alors qu’en réalité ceci a plutôt dilué les revenus générés auprès des différents partenaires. Il est nécessaire d’agréger et d’unifier l’ensemble des revenus sur ces partenaires pour les piloter.” Nathan VENEZIA, Founder & CEO de Manadge
“Le but n’est pas forcément d’ajouter un maximum de partenaires mais surtout de monitorer l’ensemble de la demande via un stack publicitaire efficace pour débrancher une partie des SSP / bidders qui ne font qu’office de vases communicants, et ne garder que ceux qui génèrent de la vraie valeur incrémentale” Kevin GOHIN, CSO de The Moneytizer
“Si l’éditeur n’a pas développé une vraie expertise pour maîtriser l’ampleur de la compétition, il peut rapidement foncer droit dans le mur. La configuration des floors doit être cohérente avec l’ensemble des partenaires et des formats, ceci afin d’éviter que la stratégie de diversification ne ressemble davantage à une stratégie de vampirisation, car les acheteurs en programmatique se concentreront sur les prix les plus bas.” Bruno MICHEL, Chief Operating Officer de Smile Wanted
En outre, tous les éditeurs ne rencontrent pas les mêmes problématiques. Les éditeurs spécialisés sur des leviers encore récents, tel que l’audio digital, cherchent au contraire à augmenter le nombre de partenaires branchés en programmatique.
“Alors qu’autrefois, les SSP dédiés à la publicité audio étaient peu nombreux et connaissaient encore des problèmes d’interopérabilité importants, l’offre spécialisée se développe aujourd’hui davantage et permet à des acteurs tel que Deezer de travailler avec un plus grand nombre de partenaires en programmatique.” Gautier Balensi, Head of Operations – Deezer
Dans le cadre de l’open auction, les éditeurs ont par ailleurs la possibilité de définir les prix planchers (floor price) auxquels ils acceptent de vendre leur média. Cependant, certains éditeurs font le choix du “no floor” : “Combinée à prebid, la stratégie du no floor qui consiste à laisser la compétition se faire sans définir de prix plancher permet d’obtenir une forte valorisation de l’inventaire.” Maximilien Chikhtahar, Head of Programmatic & AdOps – Erold (ex-Planet Media)
Le content commerce ou l’affiliation
Aujourd’hui perçu comme un levier marginal, l’affiliation ou le content commerce sert les intérêts d’une certaine catégorie d’éditeurs : “Sur un marché de l’E-sport/gaming où de nouveaux produits sortent régulièrement, le content commerce est un réel enjeu pour les éditeurs spécialisés qui proposent à leur audience des articles explicatifs ou des comparatifs pour les aider à faire leurs choix (ex: quels sont les prochains jeux qu’il faut acheter ?).” Nicolas Hulsmans, Co-founder de Dexerto
L’unification des données ou comment rendre exploitables des données disparates
Qu’il s’agisse de ciblage ou de création de package, l’organisation des données est indispensable pour en tirer de la valeur : “Le digital s’est construit de façon progressive; les médias se sont équipés de toutes les technologies dont ils avaient besoin pour faire de l’A/B test, du paywall, de la gestion de données ou d’abonnés, etc. Au fur et à mesure, ils se sont retrouvés avec des outils qui utilisent des data sets différents et beaucoup de données éparpillées. Le plus gros challenge est donc d’unifier cette donnée pour lui donner du sens et l’activer.” Vincent BRACH, Sales director France, Benelux & Italy de Piano
Le rôle des formats dans la monétisation
Outre les sources classiques de revenus, la qualité, l’attractivité ou l’interactivité des formats sont également des critères qui ont un impact sur les revenus : “Les formats rich media, plus impactants que les formats display classiques permettent de faire grimper les CPM. Cependant, le taux de remplissage à 100% n’est pas toujours assuré. La vidéo offre quant à elle des CPM 2 à 3 fois supérieurs à ceux des formats IAB, d’où le fait qu’elle soit devenue incontournable.” Julie Bisschop, Responsable traffic et programmatique – Reworld Media
“Le format représente une forte proposition de valeur en interne auprès de des équipes commerciales. Il faut proposer des formats différents de ceux vendus, proposer un bon accompagnement pour faire comprendre le format et les KPIs auxquels il répond, répondre aux briefs de la conception de la création jusqu’à la diffusion, être à l’écoute, comprendre les enjeux des éditeurs et faire en sorte que l’offre poussée en réseau par la technologie soit différenciante.” Romain CAUCHOIS, Global Supply & Partnerships de BeOp
La technologie, socle des transactions
La technologie occupe une place centrale dans les échanges publicitaires (adserver, SSP, etc.). Forts de leur expérience, les éditeurs ont une idée assez précise de leurs besoins en la matière : “Un bon stack technologique doit être solide et interopérable, assurer la transparence et des collaborations fiables, permettre d’organiser la data et de réaliser de l’ad decisionning (quelle publicité ? A quel endroit et à quel moment ?) mais surtout d’aider les éditeurs à reprendre le contrôle sur les échanges et les inventaires. Aujourd’hui, le pouvoir est encore trop souvent aux seules mains des acheteurs.” Luc Vignon, DGA en charge de la transformation digitale – 366
« Les stacks technologiques doivent être en mesure d’apporter une solution globale face à des éditeurs aujourd’hui très compétents, qui comprennent très bien le marché et les enjeux face aux GAFA.” Alexandre CANU, Head of Sales Publisher Platforms de Yahoo
Dossier constitué par Stéphanie Silo
Ce sujet a été débattu le 25 mars à l’occasion du webinar Topic of the Month lors du webinar des Ratecard Days. Le replay ainsi qu’une note de synthèse sur les points clés à retenir du webinar sont disponibles ici.
Prochain webinar Topic of the Month
« Attribution Marketing : nouvelles règles et best practices », le vendredi 22 avril 2022 lors des Ratecard Days. Inscriptions ici.