Par Brian Suh, directeur, Analyses & Solutions chez Visual IQ
Les cookies ont récemment fait l’objet d’une très mauvaise presse. Plus récemment encore, des rumeurs se sont propagées selon lesquelles Google prévoit de remplacer les cookies par une technologie de suivi appelée AdID, ce qui n’a fait que relancer le débat de l’avenir des cookies. Si la source est fiable – les détails concernant la technologie doivent encore être dévoilés par Google – comment l’entreprise prévoit-elle exactement de mettre son plan en action ? S’inspirera-t-elle d’Apple, pionnier de la première heure du suivi de profils sans cookies, pour rédiger une feuille de route ? Ou suivra-t-elle l’approche qu’elle a empruntée avec Android ? Ces deux géants de l’industrie ont considérablement appris de leurs avancées en alternatives aux cookies, donc que peut-on tirer de leurs expériences ?
L’évolution de l’UDID (Unique Device Identifier) d’Apple a été pour le moins ardue. A ses débuts, il a suscité l’intérêt de plusieurs nouvelles entreprises et de services de tierces parties, essentiellement sous la forme d’applications exploitant l’UDID pour recueillir et monétiser les données des utilisateurs. Lorsque Apple s’est rendu compte qu’elle ne tirait aucun bénéfice de ces revenus et que les consommateurs se sont mis à se demander sérieusement comment leurs données étaient traitées, l’entreprise a pris la décision en mars 2012 de commencer à bloquer l’ensemble des applications qui utilisaient sa fonctionnalité. Mais le coup de grâce est survenu lorsqu’il a été rapporté que le groupe de pirates AntiSec a rendu public 1 million d’UDID qui, selon eux, provenait d’un ordinateur portable appartenant au FBI et qui en contenait soi-disant 11 millions de plus. En mars 2013, les nouvelles applications qui faisaient appel aux UDID ont toutes été supprimées en même temps.
La solution alternative proposée par Apple était l’Identifier For Advertising (IDFA), qui protège les informations de l’utilisateur en permettant à Apple d’instaurer un degré de confidentialité plus élevé pour ses données 1st party, tout en continuant à autoriser d’autres entreprises à utiliser la plateforme iOS pour leurs activités. Dans ce cas de figure, Apple jouit toujours d’un avantage concurrentiel significatif par rapport aux entreprises tierces, dans la mesure où elle a la mainmise sur la plateforme et peut facilement l’associer aux données 1st party. En effet, iOS 7 a été perçu comme une nouvelle initiative pour inciter les publicitaires à utiliser la technologie publicitaire propre à Apple.
Google a également adopté une approche similaire, en instaurant un identifiant sur ses appareils Android. A l’instar d’Apple, Google a utilisé les informations de ses comptes Gmail/Google pour les recouper avec ses informations 1st party. Cette approche a apporté un avantage significatif à Google, dans la mesure où il peut facilement relier une vaste quantité de données 1st party et d’informations multi-appareils, etc.
Cependant, Google n’a pas explicitement tenté de bloquer ni d’empêcher les développeurs d’utiliser ses identifiants uniques. De fait, Google a activement soutenu l’utilisation de ses identifiants Android de manière à augmenter leur adoption et à atténuer toute question éventuelle relative à la loi anti-trust. De cette manière – et parce que Google ne percevait pas les 3rd party comme une menace envers son activité principale de publicité – il pouvait conserver son avantage avec ses données 1st party tout en contribuant à consolider la marque afin qu’elle se hisse au rang de colosse qu’elle est devenue aujourd’hui. En autorisant un identificateur unifié à travers leurs plateformes respectives, Google et Apple ont été en mesure de les monétiser, ce qui, à première vue, semble être une évolution nécessaire pour ceux qui rivalisent pour contrôler leur chiffre d’affaires publicitaire.
Il sera intéressant de voir comment la proposition d’AdID de Google se matérialise, si tel est le cas. Suivra-t-elle l’approche initiale privilégiée par Apple, qui consiste à restreindre les données 3rd party, ou décidera-t-elle que son approche avec Android était la bonne et jugera-t-elle nécessaire de fournir l’accès pour soutenir ses autres activités ?
Le fait qu’Apple ait finalement changé de position pour fournir l’accès aux 3rd party pourrait suggérer que l’approche d’Android était la bonne. Toutefois, étant donné la tournure que les données 1st party, désormais convoitées et capitales pour les entreprises, ont prises depuis les débuts d’Apple et de Google, il reste à savoir comment les événements vont se dérouler si les rumeurs s’avèrent véridiques. L’équilibre des forces de nos géants de la technologie pourrait bien être sur le point de basculer une fois de plus.