Il ne se passe pas une semaine sans qu’un annonceur qui opère en permanence des campagnes RTB ne constate une fraude au clic. D’ailleurs, il y a quelques semaines, l’entreprise Spider.io a pris la main dans le sac plusieurs networks après avoir généré des milliards de fausses impressions publicitaires. Ce cas n’est pas isolé. La fraude coute plusieurs dizaines de millions de dollars chaque année. Il faut arrêter de minimiser le problème. Attention, il ne s’agit pas des bannières affichées en bas de page sur des sites de mauvaise qualité. On parle des bannières invisibles, celles qu’un internaute n’a aucune chance de voir car diffusées à l’intérieur de pixel 1×1 ou bien cachées derrière d’autres bannières. Alors comment lutte-t-on efficacement contre la fraude ?
Tout d’abord, soulignons le travail quotidien des DSP qui opèrent des contrôles de qualité des éditeurs. Il utilisent aussi des outils de « brand safety » et de contextualisation ainsi que des listes noires. Malheureusement cela ne suffit pas. Cela ne sert à rien de blâmer les éditeurs. C’est aux acheteurs de se prendre en main. Pour ce faire, il faut reconsidérer la manière dont les performances sont évaluées. En effet, il est possible de diffuser des dizaines de publicités dans l’arrière-plan d’un navigateur ou dans un espace de la taille de 1 pixel x 1 pixel sans que l’internaute ne visualise la publicité des annonceurs ne serait-ce que l’espace d’un moment. Depuis cette bannière invisible, il est tout aussi facile que les robots créent des clics.
Une impression sur dix serait frauduleuse
Plusieurs entreprises spécialisées dans la lutte contre la fraude ont dévoilé des études pour évaluer l’ampleur du phénomène. Il ne s’agit pas de dizaines ou de centaines de millions d’euros de fraudes. On parle de milliards. Sur un marché mondial du display estimé à plusieurs dizaines de milliards d’euros l’addition monte vite si on estime que seulement 10% des impressions sont frauduleuses. C’est pour cela que toute l’industrie préfère se taire plutôt que de lutter contre le crime. Au final tout le monde en profite : les éditeurs, les networks, les agences, les ad-servers… tous sauf les annonceurs qui généralement ignorent totalement le phénomène ou préfèrent fermer les yeux quitte à le sous-estimer.
Pourquoi ad-exchange.fr ne permettrait pas à tous les acteurs du marché hexagonal de partager leur liste noire. Google permet déjà d’identifier des milliers de sites. Pourquoi ne pas demander à de gros acteurs comme les DSP de maintenir cette liste noire et que les acteurs paient un abonnement pour recevoir les mises à jour. L’idée est bien bonne mais ce qui va se passer c’est que les petits malins vont trouver de nouvelles parades pour cacher leurs pratiques frauduleuses en utilisant chaque jour de nouveaux noms de domaines… A ce jeu du chat et de la souris, on n’a aucune chance d’y gagner. Le pire c’est que les campagnes affectées par la fraude vont avoir d’excellentes performances, du moins sur le papier. En effet, les publicités sont non seulement affichées mais aussi cliquées par des robots de façon à obtenir un taux de clic satisfaisant pour les annonceurs ou trading desk. De cette façon, il est très fortement probable que ces clics frauduleux soient le dernier dans la chaine et bénéficient donc du crédit en étant le dernier point de contact avant que la vente se réalise. C’est la technique du cookie bombing. Le pire c’est que les annonceurs n’en ont que faire alors les agences laissent faire. Demandez aux réseaux d’affiliation, ils connaissent très bien le vice et en tirent la majorité de leurs revenus. C’est une des limites d’une relation d’affaire basée sur les clics et le CPA.
Quels sont les gagnants et les perdants ?
Le grand vainqueur, c’est l’éditeur de site à l’origine de la fraude. Souvent ce sont des acteurs spécialisés dans ce marché gris. Souvent, ce sont des entreprises qui ne possèdent aucun trafic et qui ne font que créer de faux chiffres. Les agences médias bénéficient aussi des failles du système. En effet, elle peuvent créer de belles performances pour leurs campagnes et les montrer à leurs clients. En fait presque tous les acteurs de la chaine en tirent profit, même le responsable acquisition de l’annonceur qui peut montrer de beaux chiffres à son chef et gagner son bonus.
Le perdant, c’est donc l’annonceur. Parfois certains annonceurs adoptent des positions drastiques et décrètent que le display ne fonctionne pas, peu importe les indicateurs de performance que l’on montre. Les agences sont aussi prisonnières du système et ne peuvent que laisser faire. Si elles dévoilent la vérité à l’annonceur ce dernier va délaisser le display au profit d’autres canaux.
Il n’y a pas de bonne ou de mauvaise solution, pour les annonceurs, il est peut-être temps de mesurer différemment le succès des campagnes. Il faut changer les indicateurs performances comme les clics et les conversions et trouver de nouveaux KPIs qui ont un impact réel sur les annonceurs. La balle est dans le camp des annonceurs. C’est à nous de changer la donne. Les fournisseurs s’adapteront aux nouvelles règles du jeu que nous leur fixerons. Êtes-vous prêts, le changement c’est peut-être pour maintenant…
6 questions déja posées
Merci pour cette mise en lumière dont je ne me doutais pas de l’ampleur.
Je ne comprends pas pourquoi vous dites que « C’est une des limites d’une relation d’affaire basée sur les clics et le CPA » : le CPM engendre les mêmes soucis d’impressions frauduleuses…
Une autre idée de solution : analyser la valeur réelle de tous les clics qui ont eu lieu avant la vente, et pas seulement du dernier. Cela permettra de donner moins de valeur à un dernier clic frauduleux, et au contraire de mieux récompenser les autres clics qui ont davantage contribué à la vente. C’est complexe, mais il y a des solutions, notamment celle de passer par ma société Leverbiz 🙂
Quand vous dites « Spider.io s’est fait prendre la main dans le sac après avoir généré des milliards de fausses impressions publicitaires », à quoi faites-vous référence ? 🙂
Je pense qu’il y a confusion:
Spider.io ne s’est pas fait prendre la main dans le sac, mais a au contraire mis en lumière les activités de clics frauduleux:
http://www.spider.io/blog/2013/03/chameleon-botnet/
http://www.guardian.co.uk/technology/2013/mar/19/botnet-costing-advertisers-6m-dollars-chameleon
Merci Fabien c etait cela dont nous parlons
vision parcellaire (côté annonceur only) d un problème qui existe mais qui n’est pas nouveau loin de là.
il ya toujours eu des spiders, des robots etc et les acteurs côté achat ont mis en place des solutions
il y a les BL en effet, il y a aussi sur les dsp des solutions de nettoyage des clics drastiques..qui hélas ne sont pas encore assez « rapides » pour filtrer les faux clics (elles st pas real time)
les fausses impressions c’est un autre problème bien identifié ds l article (les fameux pixels, les frames etc..) et de ce point de vue, il ya des solutions de brand safety qui sont en place..et l(utilisation de KPI de visibilité devraient améliorer les performances..
pour revenir à la fraude au clic :
1/ il faudrait d ‘ores et déjà que les annonceurs arrêtent de regarder les Taux de clic comme unique KPI de performance.
il vaut mieux moins de clics mais qualitatifs, plutot que des tdc élevés.
de nombreuses études (comscore) ont montré 1/ que moins de 15% des internautes cliquent
2/ que ce st souvent des jeunes ou des personnes agées
3/ qu il y a de nombreux clics involontaires
4/ que les clickers sont pas forcément les acheteurs
5/ que ces moins de 15% de clickers représentent plus de 80% des clics.
le clic n’est pas une variable de performance « juste » il faut l’oublier purement et simplement.
Si l’annonceur evalue les performances sur le CPA, ou CPL, il a le choix entre :
– evaluer ces performances en incluant le post impressions ou le post clic ou les 2.
Des annonceurs qui ne regardent que le PC, car soit disant la performance résulte d’un clic et a donc plus de valeur, nous demandent par conséquent de nous adresser à moins de 15% de la popuilation internaute…quid des 85% restant qui ne clickent pas ?
si l on intègre le post impressions en plus du post clic, alors en effet on revient au problème des « fausses impressions » (cf ci dessus)
c’est un peu un problème sans fin, mais la 1ère étape est déjà de connaitre le marché du digital et les KPI envisageables et oublier le tdc ou les perf PC uniquement…