Ad-Exchange, analyses et expertise technique AdTech et MarTech
ANALYSE DATA INTERVIEW MESURE PROGRAMMATIQUE

Pour se libérer des cookies, ne pas confondre sémantique et contextuel (interview G. Berthon, Qwarry)

Partager sur Linkedin

Il y a le ciblage sémantique et le ciblage contextuel. Il ne faudrait pas confondre les deux, selon Geoffrey Berthon (ex-Nextperf), cofondateur de Qwarry avec Julie Walther (eBay, Yahoo). Contrairement aux logiques de ciblage contextuel, la solution proposée par leur start-up serait totalement « cookie free ». Les investisseurs  semblent l’avoir compris, puisque Qwarry a bénéficié d’une levée de 2 millions d’euros il y a quelques semaines. Nous cherchons à comprendre les détails de cette solution.

Le ciblage sémantique n’est pas nouveau. Quelle est votre différence ?
Geoffrey Berron, Qwarry.
Geoffrey Berron, Qwarry.

Il faut distinguer plusieurs niveaux de ciblage. Chercher un mot clé dans un contenu, c’est le principe appliqué chez Google. Nous ne cherchons pas des mots clés mais des expressions utilisées dans les contenus pour comprendre le sens et le sentiment d’un article. Prenons l’exemple du ciblage auto. Le ciblage par mot clé pourra renvoyer aussi bien au dernier lancement chez Renault qu’à Carlos Ghosn. Le ciblage sémantique saura faire la part des choses. L’idée est de maîtriser parfaitement ce que cela implique comme sens et s’il y a une valeur pour l’annonceur.

Dans la mesure où vous analysez le contenu consommé par l’utilisateur, n’avez-vous pas besoin de déposer un cookie dans son navigateur ?

Non. Nous ciblons le contenu lu par l’utilisateur à un instant T, peu importe ce qu’il fait avant ou après.  Nous recevons l’url et nous savons de quoi parle le contenu. Tous les utilisateurs arrivant sur la même url auront potentiellement le même annonceur, la même bannière.

C’est différent des technologies de ciblage contextuel. Ces dernières sont en réalité du pur retargeting. Elles posent un cookie sur l’ordinateur des utilisateurs, qui seront alors retargetés tout au long de leur navigation en fonction d’une recherche réalisée. Nous, c’est donc différent.

Cela veut-il dire qu’avec Qwarry nous revenons à une méthode d’achat média qui existait avant l’avènement du cookie et du ciblage « à l’individu »?

Oui, tout à fait, mais avec une différence importante. Si dans le passé les régies vendaient des packages thématiques regroupant leurs sites, nous analysons url par url. Nous permettons de retrouver un contenu qui traite d’une thématique spécifique sur un pool d’éditeurs, et à l’infini. Ce n’est pas parce qu’il y a des sites affinitaires beauté qu’il n’y aura pas d’articles beauté chez Le Figaro par exemple. Nous filtrons les flux d’information en fonction des besoins de la campagne. Et nous créons ces thématiques sémantiques en programmatique, en proposant aux plateformes de faire de la catégorisation en temps réel.

Tous les utilisateurs arrivant sur la même url auront potentiellement le même annonceur, la même bannière.

Vous mentionnez le fait que vous allez proposer aux annonceurs, éditeurs et agences médias la data sémantique de Qwarry directement dans leurs propres outils. Pouvez-vous nous l’expliquer ?

Notre outil a été lancé en 2019 uniquement sur notre propre DSP, lui-même connecté à tous les SSP du marché (Google, Smart, Xandr, Improve Digital, Dailymotion, etc.). Nous gérons les budgets des annonceurs en mode managed. Nous pensons en revanche que l’avenir est de donner l’accès à notre data sur tous les outils. Pour le moment, nous sommes branchés à Xandr : n’importe quel acheteur ou vendeur utilisant cette technologie peut nous activer. Les connexions sont en cours avec  d’autres DSP.

Pouvez-vous nous citer quelques études de cas ?

Teréga voulait communiquer sur l’énergie verte à travers un ciblage RSE. Notre campagne d’activation vidéo a été comparée avec une diffusion sur YouTube basée sur de la data utilisateur. Avec notre système de ciblage sémantique à l’url, nous avons obtenu 62 % de vidéos vues contre 53 % chez YouTube et un taux de rebond de 18 % contre 22 %. Le coût de la vidéo vue à 100 % était de 3 centimes chez nous, contre 7 centimes chez YouTube. Quand on affiche la vidéo dans un contenu adapté, l’attention générée est supérieure.

Une campagne de bannières classiques que nous avons activée pour un constructeur automobile  a généré 4,5 pages vues par session suite au clic sur la bannière. Ce résultat a été de 67 % supérieur à ceux de concurrents qui faisaient du ciblage contextuel, avec aussi deux fois plus de temps passé sur le site et un taux de rebond 31 % inférieur.

Vous avez levé 2 millions d’euros cette année. Quels sont vos projets ?

Nous sommes une quinzaine de personnes entre Paris et Caen, où se trouve notre R&D. Notre projet est de doubler nos équipes à moyen terme. Nous souhaitons développer notre offre data as a service auprès de Xandr et d’autres DSP et SSP, qui proposerons notre data intégrée.

Nous allons également développer un outil spécifique pour les publishers. Ce sera un outil d’aide à la monétisation basé sur la sémantique. Les publishers sont beaucoup trop dépendants des cookies, avec 70 % à 90 % de leur chiffre d’affaires obtenu en programmatique. Les régies vendent aujourd’hui sur Chrome à seulement 50 % de leurs audiences (qui acceptent le ciblage tel que prévu par le RGPD). La sémantique leur permettra de s’affranchit de ce problème. Nous allons leur proposer également un format créatif 100 % sémantique adapté à leur contenu en temps réel. Tout le contenu autour de la publicité sera dynamique, personnalisé en temps réel pour permettre une hyper contextualisation. Nous le développons avec le soutien d’OFF7, le programme d’accélération du groupe Ouest-France.

Enfin nous avons également l’intention de créer des bibliothèques sémantiques en anglais.

Combien de clients à ce jour ?

Nous avons une trentaine de clients, plutôt des grands comptes via  des agences.

Propos recueillis par Luciana Uchôa-Lefebvre

Laisser un commentaire