La richesse des données des opérateurs télécom n’est plus à démontrer. Ces dernières sont convoitées par l’industrie de la publicité. En France, Orange Advertising en faisait pourtant un usage plutôt timide jusqu’à présent. Il était en tout cas limité au périmètre de l’inventaire de la régie. Mais sa stratégie a changé, en illustre le lancement récent de sa data marketplace privée avec technologie Appnexus. Béatrice Lhopitallier, directrice marketing et data d’Orange Advertising nous explique la nouvelle stratégie data d’Orange. Elle nous précise plus des détails sur le fonctionnement et l’avenir de la place de marché.
Pouvez-vous préciser les types de données que vous êtes en mesure de proposer aux annonceurs ?
Nous valorisons la donnée Orange. Notre offre est complètement en adéquation avec l’ADN d’un opérateur télécom, notre donnée prend racine dans la connaissance client de l’entreprise. Un opérateur télécom dispose d’un volume considérable de clients dont il connaît le profil sociodémographique et la typologie de produits auxquels ils souscrivent en tant que clients. Nous avons 25 millions de clients. Nous disposons d’environ 20 millions de cookies qualifiés (logués, authentifiés et consent). Notre taille critique nous permet ainsi de proposer une offre à la foi qualitative et volumétrique. Le premier socle est par conséquent la donnée sociodémographique : genre et âge.
La donnée de géolocalisation sera-t-elle la prochaine étape ?
Nous regardons comment pourrons-nous la collecter de manière respectueuse et en conformité avec la législation en vigueur pour la proposer au marché. C’est un sujet pour 2020. Nous proposons dès à présent en revanche toute la donnée géographique que l’on connaît grâce au code postal et au code IRIS de nos clients. Ces données nous permettent par exemple de proposer un ciblage lié à la zone de chalandise d’un point de vente. À partir de cette connaissance géographique, Orange a développé une segmentation marketing propriétaire, « Geolife ». Cette segmentation répartit les clients en fonction de la zone géographique de leur résidence. D’autres données open source nous permettent de la qualifier (zone pavillonnaire aisée, urbaine ou rurale traditionnelle, etc.).
Nous proposons dès ce mois-ci également une donnée BtoB (secteur d’activité, CA, etc.) via nos deux millions de clients professionnels, des TPE/PME.
Êtes-vous en mesure de classer votre base de clients en fonction du type de produits culturels qu’ils consomment via les box ?
Tout à fait : Orange est distributeur de contenus de télévision via sa box et dispose donc de la connaissance de tout ce qui est consommé en matière de télévision et de vidéo à la demande par ses clients. Ce sont 7 millions de clients équipés d’une box Orange, soit 40 % des parts de marché. Nous sommes le premier opérateur français dans ce domaine.
Nous sommes en capacité de savoir si la box est allumée ou éteinte et quelle chaîne est regardée avec le time spent. Ces informations nous permettent de reconstruire les programmes regardés par foyer en temps réel. Pour le moment, cette donnée n’est pas encore disponible dans la private marketplace. Mais à l’avenir nous pourrons proposer par exemple des segments de petits/moyens/gros consommateurs, par typologie de programme regardé, les gens exposés ou non à une campagne, etc.
Cela dépend de quoi ?
Cela dépend encore de quelques développements en termes d’architecture de flux pour que cette donnée puisse alimenter l’écosystème programmatique. De plus, il faudra remplir le prérequis de la privacy : nous ne pourrons rendre cette donnée disponible que dans les cas des foyers que nous aurons donné un consentement explicite sur le fait de pouvoir collecter et activer ces données à la fois pour le ciblage et la mesure de l’efficacité publicitaire. Nous mettrons en place ce mois-ci notre campagne de collecte d’opt-in. Cette donnée télé sera par conséquent accessible probablement à partir de septembre.
Qu’est-ce qui vous fait penser que les gens seront d’accord ?
Ils ne seront pas une majorité, le taux de consentement ne dépassera probablement pas les 40 % ou 50 %. C’est la promesse d’une publicité plus pertinente qui pèsera sur leur décision. Nous sommes extrêmement vigilants pour ce qui est de la vie privée : nous ne mettons à disposition aucune donnée personnelle. Il est ainsi impossible de cibler une personne de façon individuelle.
La suite de l’interview de Béatrice Lhopitallier, directrice marketing et data d’Orange Advertising sera publiée demain.
Propos recueillis et édités par Luciana Uchôa-Lefebvre