(Suite de la série de billets livrant les définitions des acteurs de l’industrie de concepts clés de la publicité en ligne.)
Edgar Baudin, co-fondateur et partenaire, Makazi : « Le marketing utilise des outils de mesure depuis longtemps : le coupon de réduction des 3 suisses envoyé par courrier, le programme de fidélité d’un grand magasin, les offres ciblées envoyées par email etc… Le tracking web est la dernière évolution des outils de mesure et de ciblage de publicité. Mais ce procédé inquiète aujourd’hui les internautes. La faute peut être attribuée à des ciblages agressifs, trop de répétitions d’un message de retargeting ; mais aussi au sentiment pour l’internaute de ne pas maîtriser ce que l’annonceur sait de lui. En France, la CNIL a d’ailleurs annoncé un audit de tous les partenaires « cookie sweep » pour le mois d’octobre, c’est l’illustration que le marché mûrit et se civilise.
La raison d’être du tracking est de permettre de cibler et de mesurer la performance. Pour le consommateur cela se traduit par une meilleure publicité plus pertinente et, au final, par moins de publicité polluante et sans intérêt. Quant à la question de l’utilité de la publicité sur Internet, elle est aujourd’hui la base du modèle économique de tous les services du quotidien : moteurs de recherche, réseaux sociaux, email, car ces outils ne se rémunèrent que par les services publicitaires… »
Renaud Biet, co-fondateur, TabMo : « Simplement que la publicité est bien mieux acceptée lorsqu’elle est adaptée à ses propres habitudes de consommation, et que le tracking permet aux annonceurs de le faire. »
Guillaume Gélis, Country Manager France, Zanox : « Pour que le consommateur comprenne ce mécanisme, il est important d’insister sur le fait que le tracking par cookies permet de déterminer des profils d’utilisateurs en fonction de leurs comportements de navigation, en leur attribuant des identifiants anonymes. Les cookies ne sont donc pas des données personnelles : un cookie n’est pas une personne mais un profil anonymisé dont on enregistre le comportement de navigation uniquement. Le véritable intérêt du tracking par cookies est qu’il permet aux annonceurs de comprendre les centres d’intérêt de profils utilisateurs. Grâce à cette data, l’annonceur gère mieux la pression publicitaire, il évite ainsi de spammer l’internaute avec des messages qui ne l’intéressent pas et lui propose des messages personnalisés, en adéquation avec ses attentes. »
Vincent Karachira, CEO, Nextperformance : « Je lui demanderais surtout de faire un choix. Que vaut-il mieux : un monde de l’Internet ou il devrait payer 10€ par mois pour accéder à ses services préférés (Facebook ou autres) ou conserver Facebook gratuit mais avec des publicités ciblées (plutôt que des publicités sans rapport avec son centre d’intérêt) ? Et je lui dirais que tant que le tracking n’est pas nominatif, il n’y a rien à craindre de la publicité sur Internet. »
Corine Mrejen, directrice générale de M Publicité : « Le tracking est l’ensemble des actions de collecte mises en œuvre pour recueillir des informations sur les comportements online des individus. Il peut être abusivement assimilé à de la surveillance. A cela, il est nécessaire d’opposer un prérequis : les données collectées entrent dans le cadre d’un contexte juridique français et européen très précis. La collecte et le traitement des informations s’opèrent donc selon des règles visant au respect de la vie privée des individus sur Internet. Ces données collectées sont anonymes. « Tracker » un individu, c’est avant tout déterminer ce qu’il fait et non qui il est. Ainsi, le tracking a pour vocation d’aider au pilotage des stratégies des éditeurs de contenus online. Que ces stratégies se déploient à des fins éditoriales et informatives, publicitaires ou transactionnelles, elles ont pour résultante l’amélioration de l’expérience de navigation de l’internaute via la personnalisation de celle-ci en fonction de l’analyse de données préalablement effectuée. Dans une perspective publicitaire, c’est grâce au tracking que le capping d’une campagne peut être opéré. L’exposition d’un internaute à un message est ainsi strictement pilotée pour éviter un effet de rejet, lié à une répétition trop importante de celui-ci. Il est donc bon de faire du tracking pour proposer au lecteur ou au consommateur une expérience enrichie, adaptée à ses préférences et maîtrisée en termes de pression publicitaire. »
Mathieu Roche, directeur général France et Royaume-Uni, Weborama : « L’équation d’Internet est simple : pour assurer la gratuité des services et des contenus sur Internet, les fournisseurs ont besoin de se financer par la publicité, et celle-ci ne peut fonctionner sans tracking. Le tracking est donc indispensable au fonctionnement de l’écosystème web et à sa quasi-gratuité. Le tracking a mauvaise réputation, mais c’est le plus souvent à tort, car les réglementations sur ce sujet sont très claires et l’encadrement de la CNIL (Commission Nationale de l’Informatique et des Libertés) très efficace. Dans certains cas, le tracking permet même d’améliorer l’expérience utilisateur en permettant par exemple de contrôler la fréquence d’exposition publicitaire et d’éviter le « matraquage » … »
Alain Sanjaume, directeur général Europe, Exelate : « Déjà, le mot tracking n’est pas le plus adapté, car chargé d’ondes négatives. Je lui préfère le mot « personnalisation ». Les consommateurs apprécient recevoir des publicités en affinité avec leurs centres d’intérêt. Cela est prouvé par les taux de clic ou de conversion des campagnes qui touchent les bonnes audiences, grâce au tracking. Il y a beaucoup de bon sens à cela. Pourquoi diffuser une publicité de rouge à lèvres aux hommes qui ne sont ni acheteurs, ni prescripteurs ? Les marques veulent aussi gérer la pression commerciale et ainsi ne pas diffuser trop de publicité à leurs audiences. Le tracking permet cela, pour le plus grand confort des consommateurs qui ne souhaitent pas être bombardés tout le temps par la même publicité. Les consommateurs plébiscitent les publicités innovantes et pleines de créativité. Hors il se trouve que le tracking est l’outil idéal de scénarisation de campagnes. Les annonceurs peuvent donc envoyer une première publicité, suivie d’autre(s) en fonction de la réaction du consommateur qui interagit avec la marque. Les annonceurs, avec le tracking, peuvent gérer des choses fort simples, comme identifier si le consommateur est un client, un prospect, un ancien client, un homme ou une femme, un sénior ou un jeune adulte. Cela leur permet de personnaliser leur publicité. Les consommateurs apprécient aussi les recommandations d’achat des sites d’e-commerce (type Amazon) et la recommandation éditoriale visant à leur proposer de lire des articles en ligne sur leurs thèmes préférés. Une fois de plus le tracking permet cela. »
Frédéric Valette, directeur, Tapvalue : « Sans tracking il n’y a pas de possibilité de comprendre l’utilisateur et donc de lui adresser des messages qui lui correspondent, et qui soient donc susceptibles de l’intéresser. La mesure du ROI pour l’annonceur n’est pas non plus possible sans tracking. Plus globalement, on peut considérer qu’il n’y a pas de modèle pertinent à la publicité digitale sans tracking, il est l’élément central et déterminant de cette industrie. »
Pour rappel…
Même dans le cadre d’un blog destiné aux professionnels et certains initiés de l’industrie de la publicité digitale, comme l’est ad-exchange.fr, certains concepts courants – comme le RTB, DSP, SSP, data, device ID… et bien d’autres – peuvent parfois sonner faux, du moins porter à confusion. Ils peuvent également évoquer autant de sens parfois que les contextes auxquels ils se réfèrent, autant de déclinaisons que d’acteurs qui les manipulent au quotidien.
Pour tenter d’y voir un peu plus clair, ad-exchange.fr a élaboré un certain nombre de questions pour cerner ces concepts et ces idées et les a posées à plusieurs dizaines d’acteurs de l’industrie, tous métiers confondus en Europe et outre-Atlantique. Les réponses sont livrées telles quelles sous forme de citations. Ce billet en est un exemple.
Propos recueillis par LUL