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Data : « Il faut que ce soit gagnant pour Auchan, pour l’annonceur et pour le consommateur » (interview)

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Retail et digital.

L’offre de segments de données issues des cartes de fidélités et des tickets de caisse apparaît comme une nouvelle et puissante source de revenus pour les acteurs de la grande distribution. Les annonceurs sont à l’affût des données pouvant enseigner avec précision les comportements et habitudes d’achat des consommateurs. Les technologies ayant évolué, ce type de données devient tendance. Le groupe Auchan a récemment lancé son offre de segments de données basés sur l’historique de transactions enregistrées au sein des cartes de fidélité dans ses 641 points de vente en France, proposée avec l’aide de la solution de l’onboardeur Temelio, qui digitalise les informations et les segmente sur la base de 1 500 critères de ciblage pour les annonceurs. Nous interrogeons Michael Cru, responsable de connaissance client à la direction marketing clients et data d’Auchan Retail France, et Olivier Letuppe, chef de projet web et partenariats à Imédiacenter, régie intégrée d’Auchan Retail France et d’Immochan France.

Les retailers deviennent des acteurs de l’écosystème de la publicité personnalisée en ligne. Vous avez lancé récemment avec Temelio une offre de segments de donnés à l’attention des annonceurs. Pouvez-vous nous préciser en quoi consiste cette offre ?

Commerce_retailM.C. À partir des données de consommation, nous sommes en mesure de créer des segments d’audience pour des secteurs spécifiques de l’industrie, afin de leur permettre d’exposer des offres publicitaires sur l’ensemble des réseaux média existants, et aussi sur nos propres réseau, à savoir auchan.fr et Auchan Drive. Pour nous, le fait de créer des cibles de consommateurs et de monétiser leur usage est une démarche tout à fait naturelle.

En effet lorsque l’on dispose de cartes de fidélité de la grande distribution, on reçoit déjà des offres personnalisées dans sa boîte aux lettres physique ou numérique. La différence avec ce type de données que vous injectez dans le marché est qu’elle sera activée pour la publicité personnalisée en ligne, c’est cela ?

M.C. C’est exactement la même chose que les bons de réduction que vous pouvez recevoir en sortie de caisse ou par courrier, mais cette fois-ci sur les médias digitaux. C’est exactement la même démarche ultra ciblée. Cela nous permet de suivre ces populations pour connaître leur consommation avant, pendant et après l’exposition à la campagne.

Est-ce que cette donnée sort de chez vous ?

M.C. Cette donnée ne sort jamais de chez nous, elle est sanctuarisée chez Temelio : nous fournissons des segments d’audience à Temelio, qui les expose directement via AppNexus et d’autres systèmes, de façon à renvoyer l’internaute directement dans nos écosystèmes, toujours sous contrôle Auchan. Nous ne vendons pas de données, nous louons leur usage. Temelio agit en tant que tiers de confiance et prestataire, et non en tant que diffuseur de cookies vers d’autres annonceurs.

Pourquoi est-ce que vous avez décidé de vous lancer dans ce secteur de la data ? Toutes ces discussions sur la vie privée et la data des consommateurs ne vous ont-elles pas freiné ?

M.C.  Nous sommes totalement transparents au sujet de l’usage que nous faisons des données, en accord avec les législations en vigueur, y compris le Règlement général de protection de données (RGPD). À partir de son compte Auchan, le consommateur peut voir toutes les offres auxquelles il a droit mais aussi toutes les données qu’Auchan a collectées sur lui : il dispose ainsi d’une maîtrise totale des données (d’achat, de visites) dont Auchan dispose sur son compte. Tous les deals que nous montons avec Temelio et l’annonceur sont en  « triplie win » : il faut que ce soit gagnant pour Auchan, pour l’annonceur et pour le consommateur.

Mobile.Pouvez-vous nous donner un exemple ?

M.C. Prenons l’exemple de la mise en avant d’un nouveau produit qui peut être intéressant pour un consommateur, car il a déjà acheté ce type de produit, dans la même gamme. On peut dans ce cas lui proposer une offre de découverte spécifique, un échantillon ou un bon de réduction.

Un annonceur pourra-t-il venir me proposer des publicités de chocolat sur le web et donc savoir que je suis une grande consommatrice de chocolat ?

M.C. Non, l’annonceur ne le saura pas. Auchan le sait. Et Auchan peut effectivement exposer cette bannière au consommateur qui aime le chocolat et qui peut dont être intéressé par ce message pour que ce dernier puisse bénéficier de cette offre. Nous travaillons vraiment dans cette logique-là.

La data étant devenue la richesse du monde connecté et les données des retailers étant très valorisées par les annonceurs par leur caractère très déterministe, réel et indicateur de propensions d’achat, pensez-vous que cela va devenir une importante source de revenus pour vous ?

M.C. C’est un levier de revenus complémentaires en effet, qui vient compléter tout un arsenal de revenus existant, l’activité de retail restant bien entendu le principal. L’intérêt de ce levier est qu’il n’engendre que très peu de frais, la marge que l’on peut avoir est donc importante. Cette offre est naissante, nous la proposons déjà à différentes agences et annonceurs, c’est une nouvelle source de visibilité sur les médias. Nous allons désormais pouvoir cibler les bonnes personnes au bon moment avec la bonne offre et, en plus, prioriser ces expositions sur le produit qui peut intéresser le plus le consommateur. Il y a une logique de priorisation qui apporte beaucoup plus d’efficacité dans l’achat média.

Olivier Letuppe, Imédiacenter.
Olivier Letuppe, Imédiacenter.

O.L. C’est une offre complémentaire à l’arsenal que l’on propose déjà avec Imédiacenter, la régie du groupe, qui nous permet d’aller chercher en dehors de notre site d’autres sources de trafic vers l’enseigne. On est donc bien sur des clients de l’enseigne que l’on vient rechercher sur des sites externes. C’est donc une logique de fidélisation grâce à un produit efficient puisque l’on propose de cibler un client sur la base de son comportement d’achat. On touche donc précisément ce qu’il souhaite. Lorsqu’il il clique sur la publicité il revient vers le site d’Auchan, l’objectif est de le ramener vers l’écosystème Auchan, sur les inventaires de la régie (sites auchandrive et auchan.fr) pour favoriser l’achat de produits. Cela peut-être sur une page d’atterrissage customisée pour l’annonceur, cela peut inclure une proposition de valeur, comme un bon de réduction, qu’il pourra consommer dans l’environnement Auchan. Le clic-to-action va l’envoyer sur une url de boutique dédiée à l’annonceur avec l’ensemble des produits qui vont être mis en avant par l’annonceur et notre enseigne. Ainsi, en quelques clics il sera à même d’inclure dans son panier un produit qui l’intéresse, avec de surcroît une offre promotionnelle.

Est-ce que cette activation vous offrira en retour plus de connaissance client ?

M.C. Nous avons déjà de tels volumes de données que l’idée est plus de réussir à capter l’attention du consommateur là où il passe le plus de son temps. C’est ce que l’on appelle « l’espace de cerveau disponible ». Quand on lui remet des bons de réduction en sortie de caisse, il vient de faire ses courses, il va par conséquent en conserver certains pour un usage ultérieur. Là avec ce dispositif de bannière publicitaire l’idée est d’utiliser le média qu’il consomme au moment où cela peut l’intéresser.

O.L. C’est le principe de pousser le bon produit au bon moment à la bonne personne dans le cadre d’une démarche triple win  shopper, retailer et annonceur .

Concrètement Il sera donc exposé à une bannière en rapport avec ses dernières courses au moment où il est en train de consulter son portable ?

O.L. Ce sera contextualisé soit sur la base de son historique d’achat, soit de sa navigation ou encore en fonction de données externes comme la météo ou une appétence particulière à une catégorie de produits. Sur le site Auchan Drive, par exemple, nous sommes capables de contextualiser la navigation d’un consommateur qui va se loguer sur le site. Dans ce cas, à certains moments dans son parcours de courses, on peut lui pousser une bannière pour une marque soit en lien avec la catégorie de produits où il se trouve dans sa navigation à ce moment-là soit en tenant compte de plusieurs catégories. Pour ce qui est de la contextualisation de l’historique d’achat, on sait que ce client qui est anonymisé achète ce type de produit ou a une appétence pour telle catégorie de produits. Dans ce cas on peut lui afficher un display ou une offre précise.

Par conséquent, le fait de pouvoir injecter ces données au-delà de vos propres sites sur les ad exchanges ouvre cette logique à d’autres sites que ceux d’Auchan.

O.L. Effectivement, il y a quelques années nous suivions une logique d’exposition de masse, puis nous sommes passés progressivement à une visibilité plus ciblée et personnalisée – aujourd’hui sur notre site nous avons déjà de très belles offres ; désormais nous agrandissons le terrain de jeu pour aller capter de l’audience sur des sites externes, pour les envoyer vers l’écosystème Auchan.

Propos recueillis par Luciana Uchôa-Lefebvre

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