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Adexchange DSP SSP

« On divisera par deux l’adtech tax » (interview A. Créput, Smart)

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La plateforme SSP Smart annonçait en toute fin d’année dernière l’acquisition de la DSP allemande  LiquidM. Nous revenons sur cette annonce pour en saisir tous les enjeux en interviewant le PDG de Smart, Arnaud Créput.

Smart a toujours valorisé le fait de se concentrer sur un seul côté… celui des publishers. Qu’est-ce qui vous a amené à changer votre positionnement ?
Arnaud Créput, Smart.
Arnaud Créput, Smart.

Smart s’est toujours positionné du côté des publishers en effet, et cela reste vrai. C’est pour mieux servir nos clients éditeurs que nous nous rapprochons de la demande. L’objectif est de procurer à nos publishers une demande exclusive, et aux acheteurs qui nous font confiance, une valeur plus importante que celle de nos concurrents. Il n’y a donc pas de changement de stratégie ni de positionnement.

Le header bidding a entraîné une concurrence beaucoup plus vorace entre les SSP du marché. Cette réalité a-t-elle pesé dans votre décision d’acheter LiquidM ?

Le header bidding a en effet comme conséquence le fait que tous les SSP accèdent aux mêmes inventaires. Pour se diversifier, il faut pouvoir proposer une demande exclusive aux éditeurs. Pour cela, il faut être capable de diriger des deals sur leur  inventaire. Le deal ID est un moyen de le faire. Il nous fallait être en mesure de le proposer de manière simple et efficace, en mettant en place un outil pour la demande complètement intégré. C’est ce que nous faisons déjà avec « Smart Buyers Connect », un outil de construction de deals ID à l’attention des acheteurs, que nous lançons à la fin de ce trimestre. L’acquisition de LiquidM vient accélérer ce processus de go to market du côté de la demande. Nous pourrons connecter de manière beaucoup plus directe les annonceurs à nos publishers.

En touchant aux deux côtés de l’écosystème, la plateforme Smart ne risque-t-elle pas de réserver les meilleurs inventaires aux clients du DSP LiquidM ?

Les agences veulent se rapprocher des éditeurs pour avoir plus de visibilité sur ce qui est fait. C’est un mouvement de fond dans notre marché. Avec leur SPO, les DSP sont en train de mettre en place ce rapprochement.  Les regroupements DSP/SSP tels que  ceux de Google ou Xandr sont des black boxes qui pratiquent des politiques d’arbitrage de frais peu lisibles.

À l’opposé de ce type de structure, Smart veut offrir une transparence pleine et entière à ses acheteurs, une transparence by design. Nous offrirons des fonctionnalités de reporting et de totale traçabilité des campagnes. L’intégration d’un DSP à notre stack est un des meilleurs moyens pour nous de mettre en place cette traçabilité à toute la chaîne de valeur. C’est ce qui nous permettra d’inciter les agences à rééquilibrer leurs dépenses, en les attribuant davantage aux éditeurs indépendantes.

N’oublions pas que Smart est le premier SSP à avoir adhéré  à l’initiative Trust.id. Et nous porterons cette initiative clé sur le marché, en France et à l’international. Beaucoup de gros acteurs ne souhaitent pas que Trust.id se développe. Notre combat sera long.

Le header bidding a comme conséquence le fait que tous les SSP accèdent aux mêmes inventaires.

Concrètement les inventaires du SSP Smart seront-ils offerts en priorité aux acheteurs de LiquidM ? Quelle règle sera observée sur le marché ouvert ?

Sur le marché ouvert, il n’y aura pas de priorité : tous les inventaires seront proposés à tous les DSP de la même manière et en même temps. Nous resterons DSP agnostiques à 100 % sur l’open auction. Le meilleur enchérisseur l’emportera.

Notre différentiel entrera en jeu dans le cadre des private market places et des deals ID. C’est une demande des acheteurs, de pouvoir choisir leur partenaire. On leur proposera  un environnement intégré DSP/SSP avec une proposition de valeur centrée sur la transparence et une adtech tax divisée par deux. Aujourd’hui, en passant par les plateformes DSP et SSP séparément, cette taxe tourne autour de 40% à 50%. Nous nous engageons à la diviser par deux.  On redistribuera de la valeur des deux côtés, aux éditeurs comme aux annonceurs.

Beaucoup de gros acteurs ne souhaitent pas que Trust.id se développe. Notre combat sera long.

À partir de quand l’intégration de LiquidM à votre stack sera-t-elle opérationnelle ?

L’intégration existe déjà, puisque nous travaillions déjà avec LiquidM. L’étape suivante pour nous consistera à intégrer leur bidder à notre outil dédié aux acheteurs, le « Smart Buyers Connect », ce qui sera accompli d’ici fin du premier semestre. Il sera alors possible pour les acheteurs d’opérer des deals ID directement sur l’univers Smart.

En parallèle, le business de LiquidM ne s’arrête pas : le DSP continuera  de développer son activité, comme il le fait aujourd’hui, en gérant des campagnes de performances pour les agences de taille moyenne. Nos bureaux et forces commerciales viendront appuyer cette activité. À terme, une fois l’intégration achevée, les acheteurs travaillant déjà sur LiquidM auront eux aussi accès à l’inventaire de Smart de manière préférentielle.

On leur proposera  un environnement intégré DSP/SSP avec une adtech tax divisée par deux.

Quelles retombées concrètes attendez-vous sur votre activité grâce à cette acquisition ?

Le principal objectif est de renforcer la demande sur notre inventaire. Nous envisageons cette acquisition comme une proposition de valeur qui va bouleverser le marché. Nous serons les premiers à offrir de la traçabilité, ce qui est une grande attente des agences et des trading desks. De plus nous baisserons la valeur de l’adtech tax. Cela va se traduire par plus de demande qui passera par notre SSP. L’effet indirect est que cela permettra de revaloriser l’inventaire des médias indépendants, aujourd’hui écrasé par Google et Facebook.

Sur votre activité, quel impact espérez-vous ?

Cette acquisition devra nous apporter un différentiel de 15 % sur notre croissance cette année. On vise une croissance de 50 % sur 2020, contre 35 % enregistrés en 2019. Mais l’effet complet de cette synergie se fera sentir l’année prochaine. Notre objectif est de multiplier par cinq notre chiffre d’affaires dans les quatre prochaines années.

 Propos recueillis par Luciana Uchôa-Lefebvre

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