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Dossier Editeurs : Quand les éditeurs reprennent le contrôle de leur activité publicitaire

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controle et visibilite

Fin 2017, les deux acteurs membres de l’alliance Skyline, Le Monde et Le Figaro, mettaient fin à leur collaboration avec une douzaine de partenaires technologiques dans le cadre de la vente de leurs inventaires en programmatique. Une décision prise après avoir constaté une baisse de leurs CPM sur le long terme et un manque de visibilité sur les publicités et annonceurs diffusés sur leurs propres pages, avec parfois pour conséquence une mauvaise qualité d’expérience utilisateur et publicitaire, voire des problèmes de brand safety. Désormais, les deux partenaires opèrent eux-mêmes la commercialisation de leurs espaces publicitaires et data afin de reprendre le contrôle de leur activité publicitaire.

S’agit-il d’une tendance générale chez les éditeurs ? Quelles sont les facteurs qui poussent les éditeurs à retrouver leur autonomie dans le cadre du programmatique ? Comment les technologies réagissent-elles ?

LES FACTEURS QUI POUSSENT LES ÉDITEURS À CHERCHER LEUR INDÉPENDANCE

La nombre de partenaires influe sur la qualité de la collaboration entre éditeurs et fournisseurs technologiques ainsi que sur les revenus.

Très hétérogène, le marché français de la publicité digitale est composé de nombreux acteurs et fournisseurs technologiques. Les éditeurs se sont peu à peu mis à collaborer avec de multiples partenaires spécialisés sur différents leviers (display, vidéo, etc.) et devices dans le but de compléter leurs compétences et d’améliorer les performances. Or, aujourd’hui, une partie des éditeurs réalisent les bénéfices d’une collaboration avec un nombre restreint de technologies. Ils constatent en effet que cela leur permet de préserver la qualité de leur collaboration mais aussi de leurs revenus et de leur expérience utilisateur et publicitaire.

Néanmoins, réduire le nombre de partenaires technologiques ne permet pas réellement de gagner des revenus mais plutôt d’en perdre moins et de gagner du temps. C’est en outre davantage la forte volumétrie d’impressions et la multiplication des inventaires qui fait perdre la visibilité sur la diffusion.
Le manque d’efficacité du display rend quant à lui les ROI difficiles à atteindre ce qui impacte également les CPM.

Une perte de confiance des éditeurs

Bugs, mauvaise expérience utilisateur, manque de transparence sur la diffusion, pratiques malhonnêtes, fraude et pertes de revenus… Tous ces facteurs ont engendré une perte de confiance des éditeurs envers les partenaires technologiques. En outre, utilisées comme un moyen de contrôler la participation des acteurs, même les blocklists proposées par les technologies ne garantissent pas d’éviter les problèmes de ciblage et de diffusion (dont les problèmes liés à la brand safety).

Qui d’autre que les éditeurs serait plus à même de vendre leur inventaire ? 

La méfiance envers Google

Certains éditeurs s’accordent à dire que Google est le meilleur partenaire technologique. Et même si on oppose souvent les éditeurs à Google, il existe une réalité marché : bon nombre d’éditeurs français utilisent les produits du géant. La qualité de ses plateformes et de son service client en font le partenaire indispensable (DFP, Doubleclick AdExchange, Doubleclick Bid Manager, AdSense,…). Toutefois, une partie des éditeurs tiennent à garder la main et à leur confier le moins de data possible.

La maturité des éditeurs

Aujourd’hui, entre A/B testing, test & learn et header bidding, les éditeurs et régies ont acquis la maturité nécessaire pour pouvoir piloter la mise en concurrence des acteurs et confirment qu’ils peuvent redevenir autonomes dans la commercialisation de leurs inventaires. C’est cette même maturité qui a conduit Le Monde et Le Figaro à premiumiser leur inventaire en fermant l’accès à la vente de leur inventaire, pour augmenter leurs CPM.

Françoise Duclos, Directrice Commerciale de la régie de Free : « Qui d’autre que les éditeurs serait plus à même de vendre leur inventaire ? Nous maîtrisons notre commercialisation et gagnons plus, simplement parce que nous vendons mieux. ». De plus, la création de technologies propriétaires s’impose aussi pour certains éditeurs.

Gaëtan Pausicles, Chef de marché publicitaire de Seloger : « Nous utilisions une technologie externe sur notre flux d’annonces immobilières pour la diffusion de publicités mais nous nous sommes rapidement rendu compte que nous pourrions faire la même chose. Nous avons créé notre propre technologie afin de l’internaliser et l’industrialiser au niveau commercial. En revanche, nous n’avons pas supprimé énormément d’acteurs. »

LES SOLUTIONS PERMETTANT AUX ÉDITEURS DE RETROUVER PLUS D’AUTONOMIE

La quête d’indépendance

Certains éditeurs sont déjà dans l’optique de gérer la monétisation de leurs espaces et de maximiser la maîtrise de leur écosystème programmatique pour limiter les intermédiaires et les frais. Evan Delmas, Business Developer Partenariats et Médias de AccorHotels : « Avoir la main sur tous les annonceurs qui communiquent chez nous en les démarchant directement faisait déjà partie de nos principes de base. »

Benjamin Drocourt, Directeur de la régie commerciale de Boursorama : « Historiquement le modèle Boursorama c’était effectivement de se reposer sur plusieurs partenaires. Aujourd’hui nous avons intégré de nouvelles compétences et avons une meilleure maîtrise du programmatique qui nous permet d’arbitrer, de faire des choix et de reprendre un peu la main sur la monétisation, de moins la subir et de garder un certain contrôle. »

« Valeur ajoutée », le maître mot

Le marché a changé : les technologies sont aujourd’hui challengées et doivent démontrer leur capacité à apporter de la valeur ajoutée sur le marché notamment par le biais d’une qualité technologique et de conseil. Elles sont lucides sur le fait qu’elles ne peuvent plus fonctionner indéfiniment avec le même modèle et s’attachent désormais à innover (formats impactants, etc.).

Du côté des éditeurs, se concentrer sur les partenaires qui se démarquent et s’adaptent aisément à un marché en perpétuelle transformation est essentiel pour reprendre le contrôle de ses inventaires.

Les technologies full stack : des solutions pour un meilleur contrôle de la monétisation par les éditeurs

En combinant ad serving, procédures de commercialisation en RTB, modes classiques ou historiques de commercialisation (vente directe, opérations spéciales, etc.), les technologies programmatiques full stack permettent aux éditeurs de supprimer les différentes couches technologiques (ad server, SSP, Adexchange) et de se rapprocher de la demande en optimisant la monétisation à travers un processus de yield holistique.

Tous les éditeurs ne peuvent agir comme Le Monde et Le Figaro en supprimant une majorité de leurs partenaires technologiques et en internalisant la monétisation du jour au lendemain.

Le Native Advertising : une solution pour de meilleurs revenus

Le native advertising peut être une solution de revenu incrémental efficace à condition qu’il soit réalisé en bonne et due forme, autrement dit harmonisé avec un contenu adapté. Ceci implique de redonner ses lettres de noblesse au native qui ne doit pas être galvaudé. Le native est avant tout porté par le contenu. Pourtant, l’erreur courante, à éviter, est pour certains de prendre la promo pour du contenu et le contenu pour de la promo.

L’internalisation de la monétisation : les difficultés dont il faut tenir compte avant de se lancer

Tous les éditeurs ne peuvent agir comme Le Monde et Le Figaro en supprimant une majorité de leurs partenaires technologiques et en internalisant la monétisation du jour au lendemain. Les deux éditeurs de l’alliance Skyline ont en effet toutes les ressources nécessaires pour réussir cette transformation, contrairement aux petits éditeurs. Seules les marques fortes sont à même de faire du « zéro partenaire ». D’ailleurs, se priver de tous ces partenaires technologiques peut être dangereux car ce sont eux qui portent l’innovation.

Dans ce marché en perpétuelle mutation, les technologies ne peuvent lutter contre l’inéluctable : elles doivent s’adapter et faire face à la volonté des éditeurs de reprendre la main sur la monétisation de leur inventaire et sur leur data. L’alliance Skyline regroupe deux éditeurs d’ampleur qui peuvent aisément s’appuyer sur leur force commerciale mais tous les éditeurs ne peuvent se le permettre. Il est possible d’envisager de nouvelles fusions de sociétés destinées à permettre de réunir les actifs et à peser davantage au sein de l’écosystème, ce, qu’il s’agisse des éditeurs ou des fournisseurs de technologies dans un contexte où le RGPD et E-privacy pourrait également redistribuer les cartes.

Dossier constitué par Stéphanie Silo

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